Merci à Nick pour ces précisions. C'est complet et parfait.
Si je rends grâce également à Pascal L pour sa maîtrise du sujet, je lui conseillerais juste de changer un peu de ton, parce que c'est justement ce type d'attitude qui m'a fait réagir sur ce fil. Je peux comprendre qu'on soit acide et rude à l'égard de son interlocuteur (j'ai moi-même usé de ce procédé sur d'autres fils

), mais seulement quand on a été soi-même directement pris à partie. Pascal L, je ne te connais pas et ta vive réaction à mon égard t'expose à dire des conneries... C'est mieux de rester courtois, on évite le ridicule et la surenchère stérile qui tourne généralement trop vite au pugilat verbal inaudible...
Vous voudrez donc bien m'excuser de ne pas avoir ingurgité, dans tous leurs détails, les 330 pages de ce fil, mais si j'ai répondu, dans un premier temps, c'était parce que j'étais agacé du traitement que certains réservaient à ceux qui n'étaient pas d'accord avec eux. La discussion et la clarté de Nick et Pascal m'ont donc permis d'avoir plus d'éléments, de juger avec encore plus de sévérité l'homme Armstrong, mais n'a pas modifié mon jugement d'un point de vue du droit sportif ni au regard de la morale sportive.
Je m'explique :
1- D'un strict point de vue juridique, même si j'ai une "ignorance totale du droit"

, je vais m'y essayer :
A la lumière des explications de Nick, je comprends maintenant pourquoi LA a été déchu de ses titres acquis antérieurement à 2004. De ce point de vue, la législation US est particulièrement choquante pour un juriste Français, dans la mesure où la prescription est un droit à l'oubli fondamental de notre système juridique, pour des raisons de paix civile. Dans la logique américaine, finalement les délits peuvent tous être imprescriptibles, puisqu'il est plutôt rare qu'un délinquant ne cherche pas à cacher son forfait. En droit Français, on n'a qu'un seul exemple de délit quasi imprescriptible à la logique similaire à la procédure US, c'est l'abus de bien sociaux, et c'est la jurisprudence qui l'a élaboré. Quand c'est sorti, ça a fait couler beaucoup d'encre chez les juristes (et encore maintenant), même chez ceux qui avaient "une totale ignorance du droit"
Cette particularité de la procédure américaine pouvait donc être surmontée par Armstrong en exerçant un recours, qui n'eut certainement pas été "grotesque", puisque le TAS aurait statué au regard des règles du code antidopage qui fait courir la prescription à compter de "l'ouverture de la procédure".
Le fait qu'Armstrong n'ait pas exercé cette voie de recours me semble plutôt avoir son origine dans des négociations avec le procureur US pour éviter des poursuites sur l'aspect pénal (je pense notamment au parjure, parce qu'ils ne rigolent pas du tout avec ça là-bas). Du coup, LA a dû faire une rapide analyse coût/avantage : accepter une décision sportive "injuste" ou s'exposer à une procédure devant un grand Jury et risquer de nombreuses années de prison. Je pense qu'il a fait le bon choix

.
De ce point de vue, Armstrong qui est soumis à une législation nationale plus dure que les autres, pâtit d'un traitement différencié (même s'il a une origine légale) au regard de la réglementation sportive.
Pour ce qui concerne la sanction à vie, je ne modifie en rien mon appréciation et maintiens que cette sanction est particulièrement choquante pour un juriste Français. En effet, en matière pénale et disciplinaire, on a une interprétation stricte des textes. Le texte est sacré, le commentaire n'est que peu de chose... C'est justement ce qui garantit la "justesse" de la sanction et le fait qu'elle puisse être comprise par le justiciable (je rappelle que c'est fondamental cette compréhension préalable de la prévention et de la sanction). Dans ces conditions, si une infraction peut avoir des conséquences impitoyables, c'est à la condition que la prévention (la règle de droit prescrivant l'interdiction) soit parfaitement claire et dénuée de toute ambiguïté, d'une part. Et d'autre part, lorsqu'on parle d'aggravation de la peine pour une deuxième infraction, c'est seulement en cas de récidive légale, à savoir après avoir été condamné une première fois. Aller directement à la peine prévue pour la récidive (en raisonnant par analogie avec ce dont a été victime LA) est intolérable. Sur ce point, c'est le code antidopage qu'il faut réformer, ou à tout le moins préciser (mais ce n'est pas la seule insuffisance de ce code, on l'avait vu avec le cas Contador).
Là encore, je trouve que la sanction de suspension à vie est "injuste", de ce simple point de vue.
Pour ce qui concerne la nature des préventions, je n'ai pas vu, dans la table des matière du code antidopage, d'infraction liée à "la conspiration". C'est peut-être une prévention spécifique à l'USADA (ce qui ne m'étonnerait pas) mais qui ne devrait pas entrer en ligne de compte devant le TAS puisque, a priori, cette prévention n'existe pas dans le code antidopage.
Cet aspect me permet donc de revenir sur le côté "il a mis ses pas dans les pas de son père" en se conformant à la coutume de sa tribu : Je me charge pour gagner. Après, ce type étant intelligent et impitoyable, il a élaboré un système particulièrement "efficace" qui lui a permis une maîtrise totale du dopage et de son environnement. Mais il a fait comme les autres, le but était de se charger pour gagner. Comme Anquetil, comme Riis, Pantani et vraisemblablement Indurain...
Le fait que son système soit plus "raffiné" n'enlève rien à l'identité de la démarche : se doper pour gagner.
Après, quant à savoir avec certitude (je dis bien certitude), s'il était le mieux dopé ou le meilleur des dopés, je pense qu'on ne le saura jamais, comme pour Anquetil, Indurain, Pantani etc.
2-D'un point de vue de la morale sportive
Si on ramène toute cette histoire à son origine : le dopage et la dénaturation des résultats qui s'ensuit, j'ai du mal à accepter que seul Armstrong soit rayé du palmarès (du TDF par exemple mais ça vaut pour toutes les autres compétitions) alors que des chargés reconnus comme Anquetil et Riis y demeurent. Il en est de même pour ceux sur lesquels pèsent de forts soupçons comme Pantani et Indurain, voire Merckx...
C'est d'ailleurs cette simple réflexion qui, avec la virulence de certains qui se reconnaîtront, m'a fait réagir. Sur ce point, les réponses de Nick ou de Pascal L n'apportent rien, et c'est normal parce que cela ressortit de la sensibilité de chacun.
En tout cas, moi ça me dérange très fortement...
Après tout ça, si Armstrong devait faire de la prison pour toutes les infractions pénales qu'il a pu commettre, je n'irai pas crier au scandale, je trouverais même ça plutôt normal. Dois-je rappeler cependant que nous sommes sur un fil purement sportif d'un forum de sport et non sur "village-justice.fr" et c'est pourquoi je préfère donc me concentrer sur la sanction sportive et ses fondements que sur l'aspect purement pénal, même si je peux m'y pencher en dépit de mon "ignorance totale du droit"
Quoiqu'il en soit, je reste convaincu qu'il y a donc un paradoxe inadmissible entre l'extrême dureté de la sanction sportive et l'éventuelle clémence de la sanction pénale (enfin ça n'est pas finit nous verrons).
J'espère que je n'ai pas été trop chiant, mais la mise au point s'imposait, à mon sens en tout cas...