Vous vous reconnaissez ?
Publié : 31 oct. 2011, 17:22
C'est tellement vrai ...
Internet et comportements sociaux agressifs

Nous voyons tous sur internet les lamentables tournures que prennent facilement les débats sur certains sites de discussion: de prime abord ou au bout d'un certain temps, la conversation, parfois sur des sujets tout à fait futiles, vire au pugilat verbal, avec violents rejets et insultes, explicites ou non. Cette agressivité, qui n'est pas habituelle dans les relations entre individus dans nos cultures policées, s'explique essentiellement par quatre facteurs qui se conjuguent.
En premier lieu, la distance introduite par le média, l'ensemble clavier-écran-ordinateur-liaison internet joue un très grand rôle. Elle éloigne les interlocuteurs, qui ne sont plus que des entités plus ou moins abstraites, comme les machines utilisées, et perdent en grande partie leur caractère humain; même si l'intervenant connaît réellement ses interlocuteurs, il se comportera comme en face de machines inhumaines et donc potentiellement hostiles. On voit bien que la distance croissante dans, par exemple, une conversation orale en présence de la personne, un entretien téléphonique et un chat sur internet entraîne une agressivité croissante dans le comportement.
Une conséquence du média spécifique est l'absence de manifestations physiques des sentiments de l'intervenant, comme attitudes du visage ou du corps, cris, etc., qui engendre une frustration comparable à celle du téléphone, les inflexions vocales en moins.
La forme d'expression par écriture au clavier et lecture à l'écran est également source d'agressivité par l'agaçante difficulté à pianoter d'un côté et les textes écrits à la va-vite et ainsi ambigus ou faussement interprétés de l'autre. Là où dans une correspondance épistolaire les délais atténuent cet effet, en permettant une lecture lente et approfondie et une réflexion sur le contenu et la réponse qui ne peut que calmer les esprits, la communication quasi instantanée sur le net incite à la précipitation de la lecture et de la réponse, où l'émotivité va s'exprimer au moins autant que la raison.
L'anonymat habituel sur internet et l'usage de pseudonymes contribuent bien sûr à augmenter l'agressivité: en face d'un inconnu, on est naturellement plus agressif que devant une personne connue, toutes choses égales par ailleurs. Dans la vie, il est rare qu'on discute longuement avec des inconnus; c'est fréquent sur internet, où l'intervenant ne connaît pas ses interlocuteurs, dont dans le meilleur des cas il a une opinion sur la personnalité fondée sur des informations très insuffisantes.
Le phénomène de groupe joue un grand rôle dans le comportement. Sur de nombreux sites de discussion, les interlocuteurs habituels se connaissent et un sentiment de groupe se crée vite, avec l'influence des « meneurs », le partage – pas toujours instantané – des idées, le suivisme, etc. Ainsi lorsqu'un élément extérieur vient se mêler aux débats, la tentation du rejet est naturellement forte en face d'un personnage nouveau, s'il ne correspond pas assez à la norme du groupe et apparaît ainsi comme déviant.
Dans les comportements sur internet, le sentiment d'impunité est sans doute pour beaucoup dans le fait que certains se « lâchent » comme ils ne le font jamais dans la vie.
Il est d'abord la conséquence de la sensation de foule: il y a des millions d'intervenants sur des milliers de forums à un instant donné, tout cela apparaît comme rassurant quant aux conséquences de comportements violents, qui ne se remarqueront même pas. Le sentiment de futilité, de légèreté de choses qui ne durent pas, passent vite, seront oubliées demain est aussi propice au laisser-aller dans les échanges; rien n'est gravé dans le marbre. Mieux, l'impunité est assurée à peu près totalement pour ceux qui peuvent a posteriori supprimer leurs traces, les administrateurs des sites par exemple; on voit que très souvent ils font disparaître ce qui peut être gênant dans leurs propos ou ceux d'autres intervenants; dans ces conditions chacun libère son agressivité sans crainte de suites quelconques.
La personnalité cachée des intervenants sur internet est également importante pour expliquer la tournure agressive des débats. Lobbyistes, fanatiques, en général bien dissimulés et nuançant adroitement leur propagande pour la déguiser en réflexion, tyranneaux, mégalomanes et déséquilibrés de tout poil se mêlent aux débats et en dénaturent l'esprit même le plus serein. Ces caractères, qui se remarquent rapidement dans une conversation physique où chacun peut mieux juger de l'autre, passent longtemps inaperçus sur internet si l'intervenant est un peu retors. Tout internaute habituel se rend compte périodiquement que tel interlocuteur, au début intéressant voire sympathique, ne débat que pour un but précis et inavoué ou souffre clairement de troubles psychologiques graves.
On peut noter en conclusion que beaucoup de points de comparaison existent entre le comportement sur internet et celui des automobilistes: anonymat, instantanéité des échanges, entre machines et non entre hommes, et agressivité conséquente tout à fait particulière dans les réactions.
Nous ne jugeons pas utile de donner des exemples. Chacun connaît des sites où ces comportements sont quotidiens; c'est pourquoi nous nous efforçons de les éviter ici.
Publié par Philippe Renève (Les raisons de la liberté)
Internet et comportements sociaux agressifs

Nous voyons tous sur internet les lamentables tournures que prennent facilement les débats sur certains sites de discussion: de prime abord ou au bout d'un certain temps, la conversation, parfois sur des sujets tout à fait futiles, vire au pugilat verbal, avec violents rejets et insultes, explicites ou non. Cette agressivité, qui n'est pas habituelle dans les relations entre individus dans nos cultures policées, s'explique essentiellement par quatre facteurs qui se conjuguent.
En premier lieu, la distance introduite par le média, l'ensemble clavier-écran-ordinateur-liaison internet joue un très grand rôle. Elle éloigne les interlocuteurs, qui ne sont plus que des entités plus ou moins abstraites, comme les machines utilisées, et perdent en grande partie leur caractère humain; même si l'intervenant connaît réellement ses interlocuteurs, il se comportera comme en face de machines inhumaines et donc potentiellement hostiles. On voit bien que la distance croissante dans, par exemple, une conversation orale en présence de la personne, un entretien téléphonique et un chat sur internet entraîne une agressivité croissante dans le comportement.
Une conséquence du média spécifique est l'absence de manifestations physiques des sentiments de l'intervenant, comme attitudes du visage ou du corps, cris, etc., qui engendre une frustration comparable à celle du téléphone, les inflexions vocales en moins.
La forme d'expression par écriture au clavier et lecture à l'écran est également source d'agressivité par l'agaçante difficulté à pianoter d'un côté et les textes écrits à la va-vite et ainsi ambigus ou faussement interprétés de l'autre. Là où dans une correspondance épistolaire les délais atténuent cet effet, en permettant une lecture lente et approfondie et une réflexion sur le contenu et la réponse qui ne peut que calmer les esprits, la communication quasi instantanée sur le net incite à la précipitation de la lecture et de la réponse, où l'émotivité va s'exprimer au moins autant que la raison.
L'anonymat habituel sur internet et l'usage de pseudonymes contribuent bien sûr à augmenter l'agressivité: en face d'un inconnu, on est naturellement plus agressif que devant une personne connue, toutes choses égales par ailleurs. Dans la vie, il est rare qu'on discute longuement avec des inconnus; c'est fréquent sur internet, où l'intervenant ne connaît pas ses interlocuteurs, dont dans le meilleur des cas il a une opinion sur la personnalité fondée sur des informations très insuffisantes.
Le phénomène de groupe joue un grand rôle dans le comportement. Sur de nombreux sites de discussion, les interlocuteurs habituels se connaissent et un sentiment de groupe se crée vite, avec l'influence des « meneurs », le partage – pas toujours instantané – des idées, le suivisme, etc. Ainsi lorsqu'un élément extérieur vient se mêler aux débats, la tentation du rejet est naturellement forte en face d'un personnage nouveau, s'il ne correspond pas assez à la norme du groupe et apparaît ainsi comme déviant.
Dans les comportements sur internet, le sentiment d'impunité est sans doute pour beaucoup dans le fait que certains se « lâchent » comme ils ne le font jamais dans la vie.
Il est d'abord la conséquence de la sensation de foule: il y a des millions d'intervenants sur des milliers de forums à un instant donné, tout cela apparaît comme rassurant quant aux conséquences de comportements violents, qui ne se remarqueront même pas. Le sentiment de futilité, de légèreté de choses qui ne durent pas, passent vite, seront oubliées demain est aussi propice au laisser-aller dans les échanges; rien n'est gravé dans le marbre. Mieux, l'impunité est assurée à peu près totalement pour ceux qui peuvent a posteriori supprimer leurs traces, les administrateurs des sites par exemple; on voit que très souvent ils font disparaître ce qui peut être gênant dans leurs propos ou ceux d'autres intervenants; dans ces conditions chacun libère son agressivité sans crainte de suites quelconques.
La personnalité cachée des intervenants sur internet est également importante pour expliquer la tournure agressive des débats. Lobbyistes, fanatiques, en général bien dissimulés et nuançant adroitement leur propagande pour la déguiser en réflexion, tyranneaux, mégalomanes et déséquilibrés de tout poil se mêlent aux débats et en dénaturent l'esprit même le plus serein. Ces caractères, qui se remarquent rapidement dans une conversation physique où chacun peut mieux juger de l'autre, passent longtemps inaperçus sur internet si l'intervenant est un peu retors. Tout internaute habituel se rend compte périodiquement que tel interlocuteur, au début intéressant voire sympathique, ne débat que pour un but précis et inavoué ou souffre clairement de troubles psychologiques graves.
On peut noter en conclusion que beaucoup de points de comparaison existent entre le comportement sur internet et celui des automobilistes: anonymat, instantanéité des échanges, entre machines et non entre hommes, et agressivité conséquente tout à fait particulière dans les réactions.
Nous ne jugeons pas utile de donner des exemples. Chacun connaît des sites où ces comportements sont quotidiens; c'est pourquoi nous nous efforçons de les éviter ici.
Publié par Philippe Renève (Les raisons de la liberté)