HANDISPORT : on peut TOUS faire quelque chose
Publié : 20 juin 2006, 10:29
Chers amis, chères amies
Je saisis l'occasion de mon titre de vice-champion de France de tandem handisport (catégorie 3, c'est-à-dire les équipages qui font leur première saison... au total nous sommes 10ème sur 25 tandems engagés)...

... pour essayer de vous sensibiliser à nouveau aux difficultés rencontrées par les sportifs handicapés, notamment non ou malvoyants, à pratiquer LEUR passion pour le sport, NOTRE passion pour le sport.
Vous êtes nombreux, dans vos récits de courses, à saluer le courage des concurrents handisport. Certains d'entre eux ont besoin d'aide pour pratiquer. La charge de cette aide pèse actuellement sur QUELQUES personnes très investies (je ne me compte pas parmi celles-ci), qui s'occupent de l'intendance, de la préparation du matériel, d'entraîner, de courir, etc...
Or, cette charge (même si c'est un plaisir et que l'on fait ça par goût, par envie, et parce que ça fait du bien à la conscience de se rendre utile) c'est une charge qui pourrait être très facilement répartie sur un nombre plus grand d'épaules, ce qui profiterait avant tout à ces sportifs handicapés que tout le monde s'accorde à trouver si méritants...
Je pense que vous n'imaginez même pas le nombre de sportifs nonvoyants ou malvoyants qui se retrouvent en carafe chaque week end pour s'entrainer ou pour courir, que ce soit sur des courses vélo ou en course à pied, faute de partenaire. Sur les championnats de France courus ce week end des 17-18 juin, une fille de mon club, âgée de 30 ans, s'est retrouvée avec un pilote, trouvé en dernière minute âgé de... 73 ans
Autre exemple : j'ai essayé de courir cette année avec un autre non voyant dont quelqu'un m'a dit qu'il cherchait désespérément quelqu'un pour courir ; mais entre le tandem, le boulot, le bébé qui arrive, le fait qu'il habite dans le 12ème à Paris et moi à Nogent, plus quelques imprévus, je n'ai même pas pu assurer une sortie par semaine.
Je ne cacherai pas les difficultés que comporte la participation au handisport, et que j'ai vécues moi-même cette année :
- une certaine perte de temps par rapport aux sorties que l'on peut faire seul : par ex, dans le cas du tandem pour moi cette année, une sortie, c'est un rdv à 9 heures au local à Montparnasse, 20 à 30 minutes de préparation du matériel, 10 minutes supplémentaires pour se mettre en route parce que les aveugles sont parfois un peu plus lents que les voyants pour se préparer, une sortie à un rythme variable selon les participants (mais rien n'empêche de faire des allers-retours jusqu'à un rond point et revenir chercher les autres), un retour à 13 heures, 30 minutes pour nettoyer et ranger le matériel, et un retour à la maison à 14 heures ; pour la course à pied, il faut soit donner rdv à un arrêt de bus ou métro et aller chercher la personne en prévoyant un endroit (vestiaire ou voiture) pour lui permettre de ranger ses affaires (canne notamment) ou bien passer la prendre chez elle... ce qui n'est pas forcément loin de chez vous... Mais est-ce qu'il n'y a pas une certaine perte de temps aussi dans les sorties entre valides : est-ce qu'on n'attend pas à 9h un mec qui arrive à 9h15 ? Est-ce qu'on ne passe pas 10 minutes à discuter après la sortie, à fixer le prochain rdv ? Est-ce que sur la piste on fait du 100% utile, sans aucune perte de temps ?
- des relations humaines pas toujours évidentes ; dans un sport d'équipe ou dans un club, on ne s'entend pas toujours avec tout le monde, il y a donc un risque non négligeable de ne pas être à 100% sur la même longueur d'ondes avec la personne avec qui on va s'entraîner. D'autant que les personnes handicapées ont parfois une certaine tendance à la victimisation (la société ne fait rien pour elles, les autres leur doivent tout, y compris supporter leurs sautes d'humeur...). Si on ajoute à ça que bon nombre d'entre elles sont au chômage, ce qui n'aide pas à l'épanouissement, on comprendra que ce n'est toujours pas évident... Je ne cacherai pas que mon partenaire de tandem de cette année avait ces travers, et que c'est parfois un peu (voire très) pénible à supporter. Mais est-ce qu'on ne le fait pas avec les gens de son club ? On n'appércie pas forcément tout le monde, mais ça n'empêche pas de nager, rouler, courir, faire des stages ensemble... En revanche avec la personne avec qui j'ai couru (quand je le pouvais) cette année, le courant est beaucoup mieux passé, car il s'agit de quelqu'un de beaucoup plus ouvert et agréable.
- pour le cas du cyclisme, des compétitions auxquelles nous triathlètes ne sommes pas forcément habitués (pelotons, courses physiquement dures avec beaucoup de variations de rythme, état d'esprit... de cyclistes...
vous voyez ce que veux dire ?)
Tout ça pour dire quoi ? Qu'aucune de ces difficultés n'est insurmontable, surtout si, au lieu d'être supportées par 10 personnes, elles l'étaient par 100, tout serait beaucoup plus simple, et les gagnants seraient les personnes handicapées qui ont envie de faire du sport : c'est pas mal de sacrifices personnels (familiaux, de ses propres objectifs sportifs) si peu de personnes acceptent de participer ; en revanche, qu'est ce que ça représenterait si chacun d'entre nous allait courir ou rouler 2,3,4,5 fois par an avec une personne handicapée ? Mais pour les membres de ces clubs handisport, faites le calcul, ça fait au moins 2 fois plus d'opportunités pour s'entraîner.
Je ne veux culpabiliser personne. On n'est pas obligé de s'investir pour les personnes handicapées. Chacun d'entre nous juge ce qu'il a envie de faire pour les autres, pour ceux qui sont en difficulté. Vous faites peut-être, sans doute des choses dans votre travail ou dans vos loisirs, des choses dont vous ne parlez pas forcément.
Mais sachant que je connais les difficultés extrêmes des handisport pour pratiquer, il y a 2 questions auxquelles je crois que tout le monde devrait réfléchir :
1. Demain, la personne handicapée, ça peut être mon copain, mon frère, mon fils, ou moi. Qu'est-ce que je penserais si j'avais besoin d'aide pour continuer à pratiquer le sport et que je ne trouvais personne pour me prêter la main ?
2. Que représentent pour moi quelques coups de main dans l'année ? Si peu. Que représentent pour les personnes handicapées ce petit effort de chacun ? Enormément : la chance de pratiquer un loisir que nous avons en commun plus souvent.
J'attends vos réactions à une demande que vous trouverez peut-être plaintive voire misérabiliste. Mais je suis sûr que certains d'entre vous seront sensibilisés à un problème dont ils n'ont pas forcément conscience, et que les choses pourront évoluer.
Pour conclure : qui est prêt à aller courir quelques fois dans l'année avec le non voyant dont j'ai parlé plus haut ou avec un autre ? Qui est prêt à aller rouler en tandem quelques dimanches par an ? Qui est prêt à appeler la fédé handisport pour leur demander quels sont leurs besoins ?
A vos claviers, et surtout à vos pédales et runnings...
Je saisis l'occasion de mon titre de vice-champion de France de tandem handisport (catégorie 3, c'est-à-dire les équipages qui font leur première saison... au total nous sommes 10ème sur 25 tandems engagés)...

... pour essayer de vous sensibiliser à nouveau aux difficultés rencontrées par les sportifs handicapés, notamment non ou malvoyants, à pratiquer LEUR passion pour le sport, NOTRE passion pour le sport.
Vous êtes nombreux, dans vos récits de courses, à saluer le courage des concurrents handisport. Certains d'entre eux ont besoin d'aide pour pratiquer. La charge de cette aide pèse actuellement sur QUELQUES personnes très investies (je ne me compte pas parmi celles-ci), qui s'occupent de l'intendance, de la préparation du matériel, d'entraîner, de courir, etc...
Or, cette charge (même si c'est un plaisir et que l'on fait ça par goût, par envie, et parce que ça fait du bien à la conscience de se rendre utile) c'est une charge qui pourrait être très facilement répartie sur un nombre plus grand d'épaules, ce qui profiterait avant tout à ces sportifs handicapés que tout le monde s'accorde à trouver si méritants...
Je pense que vous n'imaginez même pas le nombre de sportifs nonvoyants ou malvoyants qui se retrouvent en carafe chaque week end pour s'entrainer ou pour courir, que ce soit sur des courses vélo ou en course à pied, faute de partenaire. Sur les championnats de France courus ce week end des 17-18 juin, une fille de mon club, âgée de 30 ans, s'est retrouvée avec un pilote, trouvé en dernière minute âgé de... 73 ans

Autre exemple : j'ai essayé de courir cette année avec un autre non voyant dont quelqu'un m'a dit qu'il cherchait désespérément quelqu'un pour courir ; mais entre le tandem, le boulot, le bébé qui arrive, le fait qu'il habite dans le 12ème à Paris et moi à Nogent, plus quelques imprévus, je n'ai même pas pu assurer une sortie par semaine.
Je ne cacherai pas les difficultés que comporte la participation au handisport, et que j'ai vécues moi-même cette année :
- une certaine perte de temps par rapport aux sorties que l'on peut faire seul : par ex, dans le cas du tandem pour moi cette année, une sortie, c'est un rdv à 9 heures au local à Montparnasse, 20 à 30 minutes de préparation du matériel, 10 minutes supplémentaires pour se mettre en route parce que les aveugles sont parfois un peu plus lents que les voyants pour se préparer, une sortie à un rythme variable selon les participants (mais rien n'empêche de faire des allers-retours jusqu'à un rond point et revenir chercher les autres), un retour à 13 heures, 30 minutes pour nettoyer et ranger le matériel, et un retour à la maison à 14 heures ; pour la course à pied, il faut soit donner rdv à un arrêt de bus ou métro et aller chercher la personne en prévoyant un endroit (vestiaire ou voiture) pour lui permettre de ranger ses affaires (canne notamment) ou bien passer la prendre chez elle... ce qui n'est pas forcément loin de chez vous... Mais est-ce qu'il n'y a pas une certaine perte de temps aussi dans les sorties entre valides : est-ce qu'on n'attend pas à 9h un mec qui arrive à 9h15 ? Est-ce qu'on ne passe pas 10 minutes à discuter après la sortie, à fixer le prochain rdv ? Est-ce que sur la piste on fait du 100% utile, sans aucune perte de temps ?
- des relations humaines pas toujours évidentes ; dans un sport d'équipe ou dans un club, on ne s'entend pas toujours avec tout le monde, il y a donc un risque non négligeable de ne pas être à 100% sur la même longueur d'ondes avec la personne avec qui on va s'entraîner. D'autant que les personnes handicapées ont parfois une certaine tendance à la victimisation (la société ne fait rien pour elles, les autres leur doivent tout, y compris supporter leurs sautes d'humeur...). Si on ajoute à ça que bon nombre d'entre elles sont au chômage, ce qui n'aide pas à l'épanouissement, on comprendra que ce n'est toujours pas évident... Je ne cacherai pas que mon partenaire de tandem de cette année avait ces travers, et que c'est parfois un peu (voire très) pénible à supporter. Mais est-ce qu'on ne le fait pas avec les gens de son club ? On n'appércie pas forcément tout le monde, mais ça n'empêche pas de nager, rouler, courir, faire des stages ensemble... En revanche avec la personne avec qui j'ai couru (quand je le pouvais) cette année, le courant est beaucoup mieux passé, car il s'agit de quelqu'un de beaucoup plus ouvert et agréable.
- pour le cas du cyclisme, des compétitions auxquelles nous triathlètes ne sommes pas forcément habitués (pelotons, courses physiquement dures avec beaucoup de variations de rythme, état d'esprit... de cyclistes...

Tout ça pour dire quoi ? Qu'aucune de ces difficultés n'est insurmontable, surtout si, au lieu d'être supportées par 10 personnes, elles l'étaient par 100, tout serait beaucoup plus simple, et les gagnants seraient les personnes handicapées qui ont envie de faire du sport : c'est pas mal de sacrifices personnels (familiaux, de ses propres objectifs sportifs) si peu de personnes acceptent de participer ; en revanche, qu'est ce que ça représenterait si chacun d'entre nous allait courir ou rouler 2,3,4,5 fois par an avec une personne handicapée ? Mais pour les membres de ces clubs handisport, faites le calcul, ça fait au moins 2 fois plus d'opportunités pour s'entraîner.
Je ne veux culpabiliser personne. On n'est pas obligé de s'investir pour les personnes handicapées. Chacun d'entre nous juge ce qu'il a envie de faire pour les autres, pour ceux qui sont en difficulté. Vous faites peut-être, sans doute des choses dans votre travail ou dans vos loisirs, des choses dont vous ne parlez pas forcément.
Mais sachant que je connais les difficultés extrêmes des handisport pour pratiquer, il y a 2 questions auxquelles je crois que tout le monde devrait réfléchir :
1. Demain, la personne handicapée, ça peut être mon copain, mon frère, mon fils, ou moi. Qu'est-ce que je penserais si j'avais besoin d'aide pour continuer à pratiquer le sport et que je ne trouvais personne pour me prêter la main ?
2. Que représentent pour moi quelques coups de main dans l'année ? Si peu. Que représentent pour les personnes handicapées ce petit effort de chacun ? Enormément : la chance de pratiquer un loisir que nous avons en commun plus souvent.
J'attends vos réactions à une demande que vous trouverez peut-être plaintive voire misérabiliste. Mais je suis sûr que certains d'entre vous seront sensibilisés à un problème dont ils n'ont pas forcément conscience, et que les choses pourront évoluer.
Pour conclure : qui est prêt à aller courir quelques fois dans l'année avec le non voyant dont j'ai parlé plus haut ou avec un autre ? Qui est prêt à aller rouler en tandem quelques dimanches par an ? Qui est prêt à appeler la fédé handisport pour leur demander quels sont leurs besoins ?
A vos claviers, et surtout à vos pédales et runnings...