Serge Girard : « La volonté, je l'ai acquise dans la Dombes »
Le « Forest Gump » de Saint-Trivier-sur-Moignans termine son tour d'Europe en 365 jours de course sans repos. Il passe dans l'Ain mardi et mercredi. Une étape très particulière, pleine de souvenirs, de passion et d'émotions
Comment ça va ?
Fatigué ! Maintenant, c'est plus du physique que du mental. Je suis blessé de partout ! Je pensais refaire l'équivalent de Paris-Tokyo, ma course la plus longue, avec simplement cent jours de plus. Alors que la marge est vraiment, vraiment importante, la marche est très haute. Sans repos, une telle course épuise son homme. Mais bon, je ne l'ai pas subie, je suis volontaire. Courir, ce n'est que du bonheur. Je suis positif et les bobos s'oublient vite.
Que retenez-vous de vos 344 jours de course ?
Des rencontres d'abord. À pied, on rencontre les gens autrement. Ensuite, une vision des villes européennes très différente de celle que j'avais. Quand je vois cette diversité, cette richesse culturelle, je suis confiant en l'Europe. C'est un continent de liberté. Avec ma petite carte d'identité, je me balade partout. C'est loin d'être le cas ailleurs !
Avez-vous découvert la France ?
J'ai surtout rencontré les Français. Ils m'ont réservé un accueil extraordinaire. Quand j'ai débarqué à Calais, dès que les portes du ferry se sont ouvertes, j'ai vu la foule qui m'attendait. Je n'en revenais pas. J'avais l'impression d'être Forest Gump ! C'est pour ces moments que j'invite les gens, les jeunes en particulier, à courir avec moi. Il est important de partager une telle passion.
Que représente pour vous le passage dans l'Ain ?
Une étape très particulière. Pour moi, ce département compte plus que celui dans lequel j'habite.
La volonté, ce besoin de solitude, je les ai acquis chez mes grands-parents dans la Dombes à Saint-Trivier-sur-Moignans. À Glétin exactement, où le petit Parisien que j'étais venait en vacances.
Aujourd'hui, la maison n'appartient plus à la famille. Mais je passe toujours devant avec la même émotion. Je ferai le détour pour me rappeler plein de souvenirs.
Les plus marquants ?
Le monument aux morts porte le nom des prisonniers de Montluc que les Allemands ont fusillés à Saint-Didier-de-Formans le 16 juin 1944. L'un d'eux n'était pas décédé. Mes grands-parents l'ont soigné. C'était quelqu'un de la Loire. Il est revenu les voir tous les ans, le 16 juin, et après lui, ses enfants et ses petits-enfants.
Je me souviens aussi de la pêche à la grenouille, ma passion. On les attrapait à la sauterelle ou à la pate rouge. On les fourrait dans le sac de jute et on allait les vendre au resto du coin. Rien que pour ça, je reviendrai…
De la batteuse, quarante personnes à la ferme ! Quand on tuait le cochon et qu'on faisait le saucisson.
La vogue des conscrits, extraordinaire ! Le marché de Villefranche, tous les lundis, quand on arpentait la longue rue qui monte…
Et puis le club de foot de Saint-Trivier, ma seconde au lycée agricole de Cibeins…
Pour un homme aux semelles de vent, vous semblez très attaché à vos racines…
C'est paradoxal mais j'y reviens de plus en plus. Ici, j'ai approché la terre.
Le mental, je l'ai grâce à tout cela. C'est plus important que le nombre de kilomètres.
Où le voir dans l'Ain
Serge Girard arrivera mardi à Beaupont en début de matinée. Direction Pirajoux, Bény, Saint-Étienne-du-Bois où « l'ultra-runner » a rendez-vous avec les enfants des écoles à 10 heures. À 10 h 30, arrêt obligatoire à l'entreprise de Michel Piroux qui a couru avec lui en Roumanie. À 11 heures, réception devant la salle des fêtes organisée par la municipalité et les dirigeants de la Miou, la plus ancienne course pédestre du département. Dans la foulée, Serge Girard prendra la route de Meillonnas, Jasseron, Ceyzériat (ou Tréconnas, s'il décide de couper), Saint-Just, la Chagne, les Sardières… Ralliement à 14 heures au rond-point du nouveau Leclerc, d'où partiront ceux qui voudraient accompagner le « marathon man » sur les dix derniers kilomètres. Descente sur Bourg, passage au centre-ville via la rue Maréchal-Foch où est prévu un deuxième départ. Puis route de Marboz. Entrée à Viriat vers 15 heures pour courir les 400 derniers mètres avec les enfants. Réception et animations à partir de 15 h 30 organisées par le centre des jeunes dirigeants, Bourg Agglomération et la ville de Viriat.
Mercredi, départ 8 heures, du parking du nouveau Leclerc. Passage obligé à Saint-Trivier-sur-Moignans. Direction Quincié par la route de Villeneuve.
en chiffres
Serge Girard
57 ans. Ultra-runner.
1997
Trans-USA. Los Angeles-New York. 4 597 km
en 52 jours, 23 heures, 20'. Record mondial.
1999
Trans-Australie. Perth-Sydney. 3 755 km en 46 j, 23 h, 12'. Record mondial.
2001
Trans-South America. Lima-Rio de Janeiro. 5 235 km en 73 j, 3 h, 40'. Record mondial.
2003-2004
Trans-Africa. Dakar-Le Caire. 8 295 km en 123 j, 2 h, 40'. Record mondial.
2005-2006
Trans-Eurasie. Paris-Tokyo. 19 097 km en 260 j,
17 h, 53'.
Le tour d'Europe
Départ le 17 octobre 2009 de Charléty. Arrivée
le 17 octobre 2010, même lieu. 365 jours à travers l'Europe (25 pays) sans repos. Objectif : battre
le record de la distance en un an, soit 22 581 km. Performance réalisée dès fin août. Vendredi, il avait parcouru 25 328,11 km
en 343 j, l'équivalent de 600,4 marathons, à une moyenne de 73,8 km/j.