NickTheQuick a écrit :
Basson, Chiotti
Nick afteur

Petite interview d'époque de Christophe Bassons :
Cyclisme
Christophe Bassons : " Je ne regrette rien "
La Grande Boucle à peine achevée, le coureur de la Française des jeux se dit motivé à l’idée de retrouver le peloton.
Celui qui a claqué la porte du Tour s’explique aujourd’hui. Il se dit déçu par l’attitude du milieu et touché par les nombreuses lettres de soutien qu’il a reçues.
Comment avez-vous vécu votre départ du Tour et les nombreux commentaires qui ont suivi ?
Christophe Bassons. Sur ce Tour, j’ai appris en fait à mieux connaître certaines personnes de ce milieu. Des gens se sont lâchés après mon départ alors que personne ne m’avait jamais dit quoi que ce soit en face ! Quand je pense que, par exemple, ils ont été jusqu’à dire que je ne travaillais pas pour l’équipe... Après, on dit : " Bassons, c’est une opération marketing. " Ce n’est pas très intelligent. Quitter le Tour, parler comme je l’ai fait, c’est plutôt prendre des risques, non ? J’ai le sentiment d’avoir mis mon boulot en jeu en continuant à dire ce que je pense.
Hein Verbruggen, président de l’UCI, a parlé de " péché de jeunesse "...
Christophe Bassons. Franchement, dans le milieu dans lequel je me trouve, je me sens plus adulte que certains ! J’ai le sentiment qu’ils veulent garder le cyclisme tel qu’il est aujourd’hui, sans penser à l’avenir.
Si c’était à refaire, vous feriez la même chose ?
Christophe Bassons. Oh que oui, je ne regrette rien. Il me tarde même désormais d’être sur les courses pour m’expliquer. Il s’est dit plein de choses auxquelles je n’ai pas pu répondre. C’est facile de parler par médias interposés. Je préfère discuter avec certaines personnes directement.
Ce retour dans le peloton vous angoisse-t-il ?
Christophe Bassons. Pas du tout. Vous savez, je ne me sens vraiment pas dans la peau de quelqu’un qui aurait quelque chose à se reprocher. Je n’ai fait de mal à personne que je sache ?
Avez-vous été étonné des marques de soutien que vous avez reçues ?
Christophe Bassons. Surtout du... manque de soutien dans le milieu. Ceux qui m’ont compris, je les compte sur les doigts d’une main : le docteur de l’équipe, Gérard Guillaume, la ministre des Sports, Mme Buffet, Gilles Delion (ancien coureur, NDLR). Après, j’ai reçu énormément de courrier de la part des gens, des spectateurs du Tour. Des lettres émouvantes de parents qui parlent de leurs craintes de voir leur enfant évoluer dans le monde du cyclisme, un milieu malsain, qui espèrent que la lutte contre le dopage va l’emporter. Quand j’ai quitté le Tour, je ne pensais vraiment pas qu’il allait y avoir un tel écho. Pour certains, c’est vrai, tout se passait bien jusqu’alors. En y repensant, il y a des choses qui me font sourire... À la télévision, par exemple, j’avais parlé des corticoïdes dans les ordonnances, et deux jours après, boum ! Mais toujours pareil, l’affaire a été étouffée, et terminé.
Tant qu’il y aura cette loi du silence, on ne pourra pas faire reculer le dopage, selon vous ?
Christophe Bassons. Exactement. Ce qui m’a fait mal, ce sont les commentaires qui ont dit que j’avais été poussé, que j’étais télécommandé. Par Antoine Vayer, mon entraîneur. Non, c’est faux. J’ai pris mes responsabilités. Antoine, c’est la personne à qui je me confie le plus dans ce milieu. C’est même en partie grâce à lui si aujourd’hui je suis encore dans le peloton. J’ai toujours fait ce métier comme je l’entendais. La décision de partir, c’est moi et moi seul qui l’ai prise. Tous les deux, on va continuer à se soutenir. Personne ne pourra nous monter l’un contre l’autre.
Avez-vous eu des contacts depuis votre départ avec les dirigeants de la Société du Tour ?
Christophe Bassons. J’espère en avoir ! Jean-Marie Leblanc a dit que j’étais " un fils à papa ", un " pistonné ". Ces gens veulent le silence. Eh bien, ils l’ont eu pendant la dernière semaine du Tour. J’ai été déçu par la réaction de Leblanc. Je savais qu’il protégeait son épreuve, mais jusque-là ! Quand l’UCI l’a obligé à accepter Virenque, je le plaignais. Plus maintenant.
Comment voyez-vous la suite de votre carrière ?
Christophe Bassons. J’ai des contacts avec d’autres équipes. On verra... Je suis motivé pour continuer. Concernant la Française des jeux, je tiens à avoir une explication avec le directeur sportif, Marc Madiot. C’est lui qui a lavé le linge sale en public, pas moi. Mais aujourd’hui, je veux lui répondre. Je vais vous dire : au début, suite à mon départ, je voulais prendre deux jours tranquilles avec ma copine, puis m’expliquer. Mais vu les commentaires, j’ai préféré commencer par les explications. C’est sûr que cela aurait été mieux pour tout le monde que je prenne le départ comme d’habitude et que je mette pied à terre au ravitaillement. Tout se serait fait encore une fois sans bruit. Mais je ne pouvais pas faire autrement. Dans ce milieu, il ne faut pas faire de scandale, tout laisser en l’état... Je ne pense pas comme ça. Aujourd’hui, je ne suis pas abattu. Motivé, plutôt.
Entretien réalisé par Laurent Flandre
Article paru dans l'édition du 27 juillet 1999