joey starr a écrit :Salut à tous,
Je n'interviens pas forcément sur ce forum , mea culpa mais là je trouve que le débat est hyper intéressant ! Parce qu'en fait il met en lumière ce que j'appelle depuis quelques temps déjà une forme de fracture idéologique autour de la valeur travail en France..
Il y a une fracture Joey, c'est vrai mais je ne suis pas persuadé qu'on puisse parler de fracture idéologique du travail, mais plutôt de fracture idéologique de l'épanouissement et de la rémunération du travail. Le problème qui se pose réellement, c'est l'insécurité sociale.
Aujourd'hui, tu peux être cadre sup dans une grosse société et demain, n'être plus rien, sinon aller pointer aux Assedic. Ce système productiviste et déjà très libéral (ne nous en cachons pas...) qui est censé tirer par le haut celles et ceux qui ont envie de travailler davantage et de se défoncer au boulot, tu le sais, ça ne veut plus rien dire, ça ne vaut plus rien et ça, que tu sois cadre sup ou salarié chez Kindy, tu le sais, tu le sens comme le souffle du boulet.
Travailler, oui, se défoncer au boulot, produire, oui, engranger des bénéfices, oui, réinjecter ces bénéfices dans l'entreprise, oui. Vivre correctement des fruits de son travail, oui. Mais aujourd'hui, cette productivité et cette rentabilité à outrance est voulue non pas par les patrons seuls mais souvent par les conseils d'administration de ces grandes entreprises, qui répondent au doigt et à l'oeil de leurs actionnaires.
joey starr a écrit :Finalement l'épisode stylsport n'est qu'un épisode comme les autres dans le paysage actuel peuplé de Danone, de HP ou de Nestlé...
Quand je parle de fracture idéologique , je fais notamment allusion à la diabolisation rampante faite autour du monde du patronnat mais également autour des gens qui ont fait le choix de travailler certes par nécessité alimentaire mais aussi et parce que on a tout à fait la possibilité de donner un sens profond à son activité professionnelle et à s'y épanouir pleinement..
Stylsport dégage, je pense et j'en suis sûr, moins de bénéfices (quand ils en font) que Danone ou HP.
Je pense que la majorité d'entre nous aimeraient donner un sens profond à son travail. Mais c'est hélas loin d'être le cas. Et même si le filière professionnelle est celle qui a été choisie et désirée, les salaires ne suffisent plus à vivre. La vraie fracture, c'est que désormais, le travail ne nous préserve plus de la précarité.
joey starr a écrit :Je ne suis peut être pas représentatif de la population salariée Française mais je commence à trop souvent entendre autour de moi des discours déplaisants ou l'on se voit taxé de petit arriviste libéral parce qu'on ne souhaite pas forcément adhérer à la logique destructrice des 35 heures ou à la dictature fachiste des syndicats.
Or aujourd'hui , il est impossible d'exprimer ses idées auprès de certaines personnes sans se voir tirés dessus à boulets rouges !
C'est dans ce sens que je parle de fracture idéologique sur la valeur du travail et du fossé qui est en train de se creuser.
La valeur du travail, ça veut dire quoi ? Qu'est-il implictement souhaité par nos parents dès notre plus jeune âge ? Avoir une situation, c'est-à-dire travailler à l'école, avoir des diplômes puis un super job pour ne pas galérer. Et ça, aujourd'hui, c'est peanuts !!! Y a des Bac + 6 et mieux encore qui vont de stages en stages, qui ont plus de 30 ans et qui ne trouvent pas de taf. Y a des Bac + 6 qui sont payés à peine plus que le smic. Y a des filières, comme tu dis, qui ne trouvent pas de salariés en nombre suffisant (restauration, BTP, etc). Pourquoi ?
Y a des jeunes diplomés à qui l'on propose stage non rémunéré sur stage non rénuméré. Et aux suivants.
Borloo a crée le CDI... à durée déterminée de 2 ans. Et sans faire de procès d'intention aux patrons qui seraient tentés de se séparer de leurs petits salariés sans ménagement, comment se loger, emprunter à une banque et vivre lorsqu'on a un contrat CDI de deux ans ?
La fracture, elle est là.
Le système fonctionne si tu es en bonne santé, si tu as un bon boulot quasi indéboulonnable, et si tu as papa et maman derrière pour t'aider les fins de mois. Si tu es blond aux yeux bleux, c'est encore mieux.
Parce que le système laisse sur le carreau plus que les autres, les jeunes, les basanés, les Mouloud, les handicapés, les plus de 50 ans et j'en passe. C'est une réalité.
joey starr a écrit :Ce fossé semblait jusqu'à présent opposer salariés et patrons, or force est de reconnaître qu'il est également en train de diviser la population active en France en opposant ceux qui travaillent versus ceux qui ne travaillent pas.].
Le choix du chômage à titre provisoire s'explique aisément. Ex : pourquoi j'irai me faire chier à bosser pour un patron qui va me virer dans six mois, engranger un max de fric alors que moi, j'ai du mal à me payer le dernier Souchon... C'est un raccourci, je te l'accorde, et pourtant...
joey starr a écrit :
Il y a un moment où il faut savoir ce que l'on veut et savoir regarder une chaîne économique dans sa globalité.
On ne peut pas , nous en tant que consommateurs vouloir éternellement tirer les prix vers le bas sans que cela impacte profondément les choix d'une entreprise sur son modèle économique ou son outil de production.
A nous de savoir regarder en face les impacts humains que peut entrainer notre souhait à vouloir de façon permanente un prix le plus bas possible pour le moindre produit ou service que nous achetons :
- que ce soit un vêtement de marque francaise fabriqué en chine
- ou un dépannage de problème par votre FAI et sa hot-line au maroc.].
Oui, on veut des prix bas parce que les salaires sont bas ! Si tout le monde gagnait 3000 euros/mois, on irait tous chez Carrefour, non ? Mon frère est patron d'une PME, il va faire ses courses chez Leader Price. Carrefour, Auchan, trop cher ! C'est une réalité ça aussi.
L'impact humain, oui, là aussi, quand Wanadoo ne fonctionne plus et que tu as la Hot Line, là, tu rigoles, là tu as l'exemple parfait des limites des délocalisations et de la rentabilité à tout va. Thierry Breton, ministre du budget, quand il était chez France Telecom, il a fait passer 1.5 à 9 % le nombre de travailleurs étrangers (payés 450 euros/mois) dans le Groupe. Bilan : bénéfices records... mais des clients de plus en plus insatisfaits. Mais qui vont aller où ? Chez la concurrence, qui pratique de la même manière...
joey starr a écrit :Posons le débat de manière claire aux Français.
Vous verrez que toute cette belle solidarité de facade volera en éclat et que chacun retournera vite à son petit intérêt personnel.
Tu as raison, en ces temps de disette, la solidarité...
Que faire ?
Une 6e République, une Révolution ? Un vrai leader politique qui sache où il va et nous avec ? Hélas, je crains qu'il ne faille rien attendre de concret avant 2007.