Billy a écrit :Tout a fait d'accord avec Nick, un Spin Doctor c'est un specialiste en image/communication. Pas la methode. On parle de "spinning", de 'communication strategy", voir de "public relationship" si on veut etre gentil... Mais je n'ai jamais entendu dire Spin Doctor pour la methode, meme dans un pays anglophone.
Aux termes que tu évoques, on assimile pas dans le grand public des pratiques critiquables et aux répercussions parfois énormes. Quand on dit un tel est le "Spin doctor" de.., c'est pour souligner que ce n'est pas un "simple conseiller" en communication...
Un conseiller en communication, il ne décide pas d'une stratégique politique à tenir supplantant les "experts"...il ne fait pas créer de toute pièce les biscuits à donner à la population...
Le conseiller en com est "connu", figure sur les photos normalement les bons spin doctor restent dans l'ombre...
C'est péjoratif comme terme...donc cela évoque des choses attachées à la fonction...laquelle fonction n'est pas censée exister, donc pas qualifiable...
« Le viol des foules par la propagande politique » : ce n'est très court
Si tu as un terme pour définir toutes les magouilles et coups tordus dont ils sont à l'initiative (un Spin Doctor utilise
des méthodes et sont à l'affut
de toutes nouvelles méthodes qui pourraient accroître leur réactivité), je suis preneur et je modifierai mon vocabulaire, promis...je n'assimilerai plus
"campagne de com de contre-feu à Spin Doctor".
Je dois être un "néo crétin" simplificateur...ou plutôt non, selon comment on prend la définition ci-dessous :
http://www.neo-cretins.com/s.htm
Spin-doctor : cette expression est de plus en plus employée par les néo-crétins dans le sens de “conseiller en communication” (et non en sexualité, comme pourrait le faire croire le terme anglo-saxon), ou stratège. ... le vocabulaire utilisé, dans le compte-rendu des prouesses du président [Clinton], résulte probablement de séances de remue-méninges de ses spins-doctors. Curieux d'employer spin-doctor dans cette phrase alors qu'on utilise l'expression française remue-méninges au lieu de brain-storming. Mais peut-être que cela aurait fait trop de mots anglais dans la même phrase ?
http://leblogueur.arte.tv/rubrique/comm ... politique/
http://www.huyghe.fr/dyndoc_actu/49f9de3b60ed1.pdf
http://questionspolitiques.blogspot.com ... hodes.html
samedi 19 mai 2007
Spin-doctors, exemples
et
méthodes
La deuxième partie de l´année 2003, après les incidents survenus en Irak, voit une critique croissante de ce que l´on appelle
les spin-doctors.
Le
conseiller le plus proche du Premier ministre britannique démissionne le 30 août et quitte le 10 Downing Street après sept ans passés auprès de Tony Blair. Bien que blanchi par le rapport Hutton dans le cadre de l´affaire Kelly, Alastair Campbell, le conseiller en question se retire de son poste. Dans le même temps, aux Etats-Unis, Karl Rove, s
pin-doctor de George W. Bush, est à son tour soupçonné d´avoir eu un comportement proche de celui de son homologue britannique. Ces soupçons, survenant en même temps,
sur les deux conseillers les plus puissants de la planète, ont fait poser beaucoup de questions.
Comment ces spin doctors ont-ils réussi à prendre une place aussi importante dans le pouvoir ? Sûrement parce qu´ils ont la technique du pur marketing électoral comme méthode de travail, et qu´elle s´est longtemps révélée efficace.
Aujourd´hui, on reprend les termes de Serge Tchakhotine : « Le viol des foules par la propagande politique » pour évoquer ces méthodes.
On cite souvent comme précurseur de cette utilisation massive des médias, le célèbre James Carville, qui a mené la campagne de Bill Clinton en 1992. Il a, pour cette occasion, créé la « War Room ». Le but est de centraliser en un seul endroit l´ensemble des informations et des réactions qui pourraient être utilisées par les médias Il s´agit d´une réflexion qu´a eu James Carville suite aux élections précédentes, pendant lesquelles Michael Dukakis avait été incapable de répondre aux attaques du clan républicain. « Il ne faut plus seulement répondre aux attaques, il faut le faire avant même qu’elles soient diffusées ou publiées, quand le journaliste s’interroge encore sur l’écho qu’il devrait y donner. »
M. Stephanopoulos ajoute : « Il nous fallait apparaître acharnés, agressifs et imprévisibles, pour mieux intimider. La War Room ne ferma jamais. Jour et nuit, des équipes de jeunes volontaires se relayèrent afin de suivre chaque geste de Bush sur leurs ordinateurs. Une antenne satellite collectait tous les programmes, interceptant parfois une publicité républicaine avant qu’elle soit diffusée, au moment où elle venait d’être envoyée à une télévision locale. (...) Nous avons même réussi à rédiger et à distribuer à la presse une réponse point par point au discours officiel de candidature de Bush alors que le président n’avait pas encore atteint le podium pour le prononcer. » Il dira même : « Peut-être était-il temps pour le Parti démocrate de sacrifier sa pureté idéologique pour valoriser son potentiel électoral.»
Un peu plus tard, en 1997, le Parti travailliste britannique refait surface, après une absence de pouvoir de 18 ans. Les techniques utilisées pour la campagne sont largement inspirées des campagnes américaines : en effet, Philippe Gould et Peter Mandelson rendent visite à James Carville et son sondeur, Stanley Greenberg, pour étudier ses méthodes de travail. A leur retour, les méthodes américaines vont être appliquées au Parti travailliste.
Ils retiennent ces leçons :
- dans le contexte actuel, où l´information est en flux continu, il n´y a plus de temps pour faire de pause. Il faut, comme la War Room être aux aguets de la presse 24h/24h.
- il faut centraliser le flux d´information en un point pour toujours pouvoir accéder à l´ensemble.
- Il faut être capable, comme Carville l´a fait, de répondre à chaque attaque, avant qu´elle ne s´éparpille dans les médias.
Et, en mai 1997, alors que Tony Blair arrive au pouvoir, Alastair Campbell convoque les fonctionnaires chargés de la communication du gouvernement :
« - Alors, quels seront les gros titres demain ?
- …
- A partir de maintenant, c'est à vous de déterminer l'actualité du jour. »
Ce conseiller de premier choix ne laisse rien au hasard, il peut répliquer à chaque instant à une attaque de l´opposition. Il sait qu´en Grande Bretagne, la presse est la plus concurrentielle du monde avec onze quotidiens nationaux et neuf journaux dominicaux qui sont dans une lutte sans merci (plus de 14 millions de journaux sont imprimés chaque jour). Aussi, il décide de faire ce que faisait Ronald Reagan, sous les conseils de James Baker, quand il était président :
il alimente lui-même la presse, pour orienter l´information.
Dès lors, c´est une douzaine de personnes qui passent leurs journées à scruter les médias (comme on l´a vu pour la campagne de VGE en France), mais ils vont encore un peu plus loin, ils alimentent une base de données : Excalibur, l´épée du roi Arthur ! Avec cette avancée technologique, l´écoute des médias est devenue totale, et le but est de tuer toutes les rumeurs dans l´œuf.
« Ainsi, le 11 mars 1997, à la Chambre des communes, on vit un porte-parole du Labour, Brian Wilson, se lever et lire son pager, en réponse à une remarque d'un collègue conservateur... Le texte de son intervention lui était envoyé en temps réel du siège du parti, où un militant avait interrogé le programme Excalibur, qui lui fournit sur-le-champ l'essentiel de l'argumentation... »
Mais les spin doctors de Tony Blair ne s´arrêtent pas là, ils tiennent à tester les messages, et Tony Blair en est, parait-il très friand : le principe est de faire entendre le message à des « Focus Group », des segments de population qui sont à convaincre en particulier, pour mesurer directement les réactions causées par une annonce, ou une petite phrase de Tony Blair.
On peut par exemple observer les méthodes de contrôle de l´information utilisées par les spin-doctors (guider la perception des actualités, d’influencer l’interprétation des événements ainsi que d’encadrer l’opinion publique) pendant la guerre en Irak :
1. Conserver et maîtriser l´initiative de l´information. Le but étant d´empêcher toute contre-propagande. Des reportages
déjà préparés ont été remis aux journalistes, ainsi que des photos,… même des COM CAM, des caméras mises au point pour la guerre en Irak qui permettent de voir en « live » la chute d´une bombe après son largage, jusqu´à son explosion.
2. Les conférences de presse officielles ont fait du gouvernement la seule source d´information. Des Media Operators ont été créés pour l´occasion, il s´agit de centres médiatiques qui centralisent l´ensemble des informations en provenance du front. Ils permettent de diffuser les informations
comme les mediaplanneurs placent leurs publicités : au moment où les gens sont le plus à même d´être téléspectateurs.
3. « L´Embeddness » : le fait de permettre aux journalistes de suivre les unités de combats pour qu´ils puissent relayer en « live » les affrontements et qu´il se crée une empathie entre ces chroniqueurs et les soldats et qu´une réelle émotion ressorte des reportages. Avant la guerre en Irak, des camps de formation pour journalistes ont été créés pour influencer leur interprétation et renforcer leur chauvinisme. Les journalistes se retrouvaient dans les mêmes conditions que les soldats, parfois en équipe avec eux, à faire les mêmes expériences.
Le seul but étant d´encadrer l´opinion publique dans les informations qui vont lui être transmises.
Ce sont là les méthodes qu´utilisent les spin-doctors pour influencer l´opinion :
• Garder l’initiative de la communication, être présent à toutes les étapes de la communication et ne rien laisser passer auparavant…
• Utiliser des images, des vidéos
façonnées pour appuyer le message.
• Créer des centres d´opérations où toutes les informations sont rassemblées (comme la War Room de James Carville).
• Influencer des journalistes, des reporters « embedded ».
Suite aux problèmes causés par les fausses informations sur la menace irakienne, Alastair Campbell a démissionné, mais reste conseiller de Tony Blair. Aux Etats-Unis, Karl Rove conserva son bureau à la Maison Blanche, à savoir celui qu´occupait Hillary Clinton durant les deux mandats précédents.
David Kelly, employé au ministère de la défense britannique s´était donné la mort après avoir annoncer à la presse que le gouvernement avait falsifiait des informations concernant les armes de destructions massives possédées par l´Irak et par ce biais justifié l´intervention militaire. Le rapport Hutton, nom du juge de l´instruction, a demandé à la BBC qui avait diffusée ces informations de faire des excuses publiques au gouvernement.
Joseph Wilson, un diplomate retiré du service actif, a raconté qu'il avait été chargé par la CIA, en février 2002, d'aller enquêter au Niger sur la tentative qu'aurait faite l'Irak de Saddam Hussein d'y acheter de l'uranium. Il en est revenu convaincu que l'information sur cette tentative d'achat d'uranium était fausse. Il a mis en cause Karl Rove, spin doctor de George W. Bush, d´être à l´origine de cette rumeur et d´avoir diffusé l´information selon laquelle sa compagne, Valerie Plame, appartient à la CIA.
Le viol des foules par la propagande politique, Serge Tchakhotine, Gallimard, octobre 1992.
Le terme a été inventé par Hillary Clinton est a fait l´objet d´un film du même nom en 1992.
James Carville.
All Too Human: A Political Education, George Stephanopoulos, Little Brown, New York, 1999.
Consultant stratégique du New Labour.
Promoteur de la modernisation du Parti travailliste, il sera députe´, ministre et spin doctor de Tony Blair.
Jean-Gabriel Fredet, Le Nouvel Observateur.
Libération, Les docteurs Folimage, 30 septembre 2003.
L'Express 02/10/1997, Tony Blair le magicien, Marc Epstein