manumag a écrit :Je m'attendais à mieux de te part
Je peux pas, chui à mon maximum.
J'ai regardé la TV les premières heures de libération d'IB, parce que j'imaginais bien que les rédactions, dans un cas pareil, dépassées par la fulgurance de l'événement, n'allaient justement par pouvoir surjouer l'info, du moins durant quelques heures. Simplement parce que les infos en provenance de Bogota arrivaient au compte-gouttes, par bribes, et dans ces conditions, tu n'as pas les "biscuits" et le temps nécessaire pour lui coller de la guimave plein les pattes.
Pujadas a été bon, sobre, pas un mot plus haut que l'autre, il a su s'effacer, tout comme PPDA, sur la TNT même chose à l'exception de BFM.
Le fait est que le "buzz" s'est déroulé à Bogota, à environ 22 heures "heure française". Et pour avoir travaillé 18 ans dans une rédaction (presse écrite), je sais le temps qu'il faut pour rameuter une équipe, recouper les infos, les images.
Quand l'info tombe, le rédacteur en chef, il rappelle ses cadres, ses "pros", son premier cercle, c'est-à-dire sa "vedette" du JT, ses journalistes accrédités à l'Elysée, au Quai d'Orsay, un ou deux consultants, et le ou les journalistes qui ont suivi le "dossier". A 22 h 30, le directeur de l'info, il pare au plus pressé parce qu'il sait qu'un bon français s'en va ronfler au douze coups de minuit, au plus tard.
Dans la foulée, il prépare les équipes du lendemain, tout le monde sur le pont, briefing très tôt dans la journée, l'horloge tourne en leur faveur, le "drame" se déroule à 7 ou 8 heures de décalage. Et quand les Français se lèveront, le marchand de sable sera en Colombie...
Et c'est à ce moment là que je ne regarde plus...
Parce que tu sais que chaque journaliste et chaque chaîne de télé va faire de la surenchère, plus de caméras, de confidences, d'infos futiles, ça joue du carnet d'adresses et du fond de teint sur tous les plateaux.
Là, t'es plus dans la réflexion, t'es dans l'action moutonnière, tu joues à celui qui a la plus grosse, et la plus belle. Service public compris.
Est-ce que j'ai regardé IB accueillie par Double patte et Patachon ? Non, je m'en cogne. Est-ce que j'ai allumé la télé ce soir ? Oui, on a regardé Gulli avec mon fils, on s'est poilés devant
Oggy & les cafards.
Le mieux, je vais te dire, c'est que lorsque j'ai manifesté dès novembre 2002 pour réclamer la libération de Betancourt, dans une petite commune des Alpes-Maritimes, alors que la France s'en branlait, je savais pertinemment qu'un jour, s'il elle venait à être libérée, ça se passerait comme ça, comme depuis 36 heures. C'est l'éternelle dualité de l'existence. Je le fais ou je ne le fais pas ?
Doit-on renoncer à ses idéaux et à ses utopies sous prétexte que la moindre recette des aubergines au four pendant 10 minutes ou le SMS de Nicolas à Cécilia sont désormais ensemencés et exploités jusqu'à la corde dans le très fertile terreau médiatique ?
Aurais-je du renoncer à militer pour les Tibétains, pour Taslima Nasreen, pour le professeur Youri Bandajevski, emprisonné en juin 2001 (libéré en 2005 dans l'indifférence internationale

) et dont le seul tort a été d’avoir osé critiquer la gestion sanitaire de la catastrophe de Tchernobyl par les autorités biélorusses et démontré les effets dévastateurs sur le corps humain de l’exposition chronique à de faibles doses de radioactivité. Qui était au courant ? Qui en a parlé ? TF1 ? France 2 ?
Et si je te dis "Krsko", tu me réponds quoi sinon à tes souhaits ?
Krsko, c'est une ville en Slovénie où a eu lieu il y a tout juste un mois, un incident nucléaire ayant déclenché rien de moins qu'une alerte dite
d'accident nucléaire majeur et d'urgence radioactive. Un mois plus tard, cet incident est en voie de banalisation médiatique

Cet "oubli" et cette inconscience sont criminels tant cette alerte nucléaire présage au contraire d'inévitables catastrophes. A la mansuétude sinon la complicité de nos responsables politiques qui ne veulent pas se froisser avec les groupes industriels concernés, s'ajoute la folie de l'argent et de la rentabilité à tout prix qui, sous couvert du progrès, entame irrémédiablement l'espérance de vie de la planète.
Mais une bonne info, c'est quoi au juste ? Qui a la recette miracle, la réponse absolue ? Jusqu'où doit-on aller, ou ne pas aller pour informer ?
Complexe, pas vrai ?
Je n'arrive pas à voir le "mal" là où certains ici semblent le dénicher et s'en offusquer tel un petit garçon qui saute à pieds joints dans une flaque de boue et qui se demande ensuite pourquoi il est tout sale...
Et puisque certains ici semblent se positionner au-dessus de la mêlée médiatique, peut-être serait-il plus utile alors d'adopter une autre attitude que le mépris, l'amalgame et la grossiéreté à l'endroit d'une femme qui n'a jamais demandé à être privée de libertés et de ses enfants durant 6 ans et qui, une heure seulement après sa libération, et en toute sincérité - comment peut-on en douter

- s'est élévée à une hauteur d'esprit et de dignité qui inspirent un seul mot, souvent galvaudé de nos jours : le respect.