Compte-rendu Norseman 2017

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Jonasko
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Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par Jonasko »

Mieux vaut tard que jamais, je voulais poster ce (long) compte-rendu afin d'aider d'éventuels veinards en pleine préparation du Norseman, c'est désormais chose faite. C'est long, mais comme il s'agit d'une course où la préparation a encore plus d'importance que sur d'autres IM, j'ai préféré en dire trop que pas assez. Pour ceux que la préparation ennuie, les trois épreuves composant la course sont annoncées par un titre en gras. Normalement, il y a quelques photos, mais ne sachant pas si cela provoquerait une surcharge si je les ajoutais, je ne mets (tout à la fin que le profil du vélo et de la course à pied).


L’histoire de « mon » Norseman commence fin 2015, quand je m’inscris pour la première fois au tirage au sort. Ce qui m’a poussé à tenter ma chance, ce sont deux photos : comme pour beaucoup de monde, celle d’un saut depuis le ferry aux premières lueurs ; mais aussi celle, en plan très large, d’un triathlète absolument seul sur son vélo, au milieu des montagnes. Le côté seul au monde est très attirant quand on apprécie moyennement les quasi-pelotons que l’on subit sur d’autres triathlons longue distance.
En 2015, les organisateurs ont introduit une nouveauté : une personne n’étant pas tirée au sort aura une chance supplémentaire si elle se réinscrit l’année suivante, et ainsi de suite. C’est donc dans cette perspective que je me réinscris en 2016, versant mon obole pour la bonne cause (10 EUR non récupérables, versés à une bonne œuvre, cette année, médecins sans frontières), et pensant ne pas être sélectionné avant quelques années. Qui sait, en s’inscrivant chaque année et en accumulant ainsi les chances supplémentaires (2 en 2016, 3 en 2017, 4 en 2018, etc), cela doit finir par passer.
Alors le 13 novembre 2016, quand je reçois un courriel dont l’expéditeur est « Isklar Norseman Extreme T. », je m’attends au même texte que fin 2015, mais sur l'écran s'affiche cette simple ligne:

"Welcome to Norseman"

Là, le cœur s’emballe un peu, et la soirée qui suit est passée à regarder quelques comptes-rendus de course, même si j’avais déjà lu religieusement le manuel de 2016. J’ai consulté d’autres comptes-rendus dans les mois qui ont suivi, et c’est parce qu’ils m’ont beaucoup aidé à préparer la course que je prends à mon tour la plume, alors que je n’ai jamais écrit de rapport de course jusqu’à aujourd’hui.

Je n’entrerai pas dans le détail sur la préparation, les gens qui s’inscrivent sont censés voir une expérience de base en matière de triathlon, et une préparation pour une distance Ironman doit leur être plus ou moins familière. Cependant, sur le groupe Facebook fermé créé par les organisateurs après le tirage au sort (et réservé aux seuls athlètes), l’un d’entre eux a posé des questions qui laissaient entendre qu’il n’avait jamais effectué de transition de sa vie… Mais bon, peut-être qu’il fait 200 km de ski de fond chaque weekend.
Bref, voici quelques chiffres (pour se faire une idée de la préparation, ceci n’a pas valeur de règle, sans doute certains athlètes ont-ils été bien mieux classés en s’entraînant moins, ou plus, ou simplement différemment).

De la date du tirage au sort (13/11/2016) à la veille de la course (04/08/2017):

1 - Distances parcourues

Natation : 204,1km
Cyclisme : 6'446,2km
Course à pied : 1'598,1 km

2- Dénivelé

Natation : 2m (et oui, plusieurs entraînements faits en remontant le courant, mis bout à bout :-D…)
Cyclisme : 72'000m
Course à pied : 18’000m

3- Sorties longues (c-à-d plus de 3,5km en natation, plus de 130km en vélo et plus de 21km en course à pied)

Natation : 3 (3,8km, 4km et 4,2km)
Cyclisme : 6 (162km, 160km, 137km, 146km, 155km et 154km)
Course à pied : 5 (34km, 26km, 21km, 21km et 24km)

4- Trois entraînements de natation en eau froide au total

Décembre - Bretagne, Océan Atlantique : 1fois 1km, 1fois 2km, eau à 11°
Avril - Luxembourg, Lac de Remerschen : 2,5km, eau à 13°
Mai - Genève, Lac Léman : 1km sans combinaison, eau à 17°


Ouessant, baie de Lampaul, Noël 2016.


5 – Divers : pas de stage, ou plutôt si, un stage mi-mai, avec deux jours de vélo puis cinq passés dans les toilettes de l’hôtel pour cause de gastro…




Mais avant de commencer l’entraînement, la priorité absolue est de trouver un logement pour les jours précédant la course, et la nuit qui suit. Les habitués (ou ceux qui sont bien informés) ont réservé une chambre avant même que le tirage au sort ne soit effectué, ils n’ont alors plus qu’à annuler s’ils ne sont pas sélectionnés. Je n’avais pas pris cette précaution et ai donc craint, en consultant les disponibilités des hôtels dans le secteur le soir même de la réception du courriel de sélection, de ne trouver une chambre qu’à 30km d’Eidfjord. Pas idéal quand on sait que le parc à vélos n’est ouvert qu’entre 3h et 3h45 du matin avant la course.
A tout hasard et sans y croire une minute, j’appelle un camping qui propose des chambres et appartements dans Eidfjord ; on me confirme qu’un appartement est libre, c’est moins cher que bien des hôtels du coin, je réserve donc. Cela m’a permis de dormir à 50m à vol d’oiseau de T2, de l’autre côté de la rivière. Trois minutes à pied pour aller poser le vélo avant de monter dans le ferry.



Cet aspect logistique ne doit certainement pas être négligé, cela prend un temps fou d’anticiper des besoins en termes d’alimentation mais aussi (et surtout) d’habillement. Contrairement à beaucoup d’autres triathlons, il est impensable de faire toute la course avec une simple trifonction : on change plusieurs fois de vêtements au gré des variations de température.

Après des tergiversations plusieurs mois, je décide finalement que le plus simple est de se rendre en Norvège en voiture. J’hésitais avec un vol vers Bergen ou Oslo puis une location, mais après avoir entendu l’histoire des traditionnels 3 ou 4 triathlètes ayant attendu anxieusement que leur monture perdue en cours de route -avec parfois les autres bagages avec- je pense que l’option « tout en voiture » nous a épargné un gros stress de dernière minute. Précisons que nous avons un Berlingo ; je n’aurais pas tenté le même périple avec une Polo...
Pour ne pas passer 22h dans la voiture la semaine d’avant-course, les étapes choisies ont donc finalement été Luxembourg-Bonn le samedi, Bonn-Kiel le dimanche, Kiel-Oslo du lundi au mardi (20h de ferry), Oslo-Rjukan (proche de l’arrivée du Norseman) le mardi.
Le mardi soir, l’avant-dernière sortie vélo de 2h sert à repérer les 25 premiers km du marathon. On peut lire ici ou là que cette partie est « fairly flat », le « fairly » a son importance. Le même soir, en voiture, repérage du tronçon 25e-37e km du marathon. On a beau être superstitieux, on repère également la partie 32,5e – 37e en espérant faire partie des 160 premiers… Ce jour-là, le sommet du mont Gaustatoppen restera sous les nuages et nous avons de la pluie battante sur tout Zombie Hill…



Le lendemain, mercredi, remontée à l’envers du parcours vélo jusqu’à Eidfjord, repérage des meilleurs coins où s’arrêter, et prise de contact impressionnante avec la température sur le plateau : il ne pleut pas, mais le mercure ne dépasse pas les 7 degrés et le vent souffle. Les bizuths qui arrivent à Eidfjord par Bergen, sans pouvoir faire de repérage, et ont sous-estimé la rigueur du climat doivent avoir un choc le jour de la course quand ils débarquent à Dyranut, chauffés par 30 km de montée…
Bref arrêt à Voringfossen, qui est le début officiel des ravitaillements autorisés sur le parcours vélo (environ au 20ième km), mais également un lieu touristique puisqu’une magnifique cascade y dévale les rochers.



On se laisse descendre vers Eidfjord, où l’on s’installe dans l’appartement avant de partir faire les courses (deux supérettes sur place). Un conseil : essayer d’acheter dès votre arrivée sur place toute la nourriture dont vous pensez avoir besoin jusqu’à la course (et éventuellement pendant la course), car les deux supérettes sont prises d’assaut par tous les athlètes et leurs accompagnateurs. Par ailleurs, amateurs d’aliments bio et locaux, passez votre chemin. Enfin bon, le Norvégien est fou mais pas au point de s’échiner à faire pousser des légumes (je ne parle même pas de tomates !) sous ces latitudes. Pas grave, comme nous sommes venus en voiture, nous avons emporté pas mal de denrées avec nous, histoire qu’une partie de l’alimentation d’avant-course me soit familière. Comme d’habitude, ma moitié (et accessoirement unique support sur la course) a été au top sur la nutrition dans les mois qui ont précédé la course, et d’une précision chirurgicale pour les aliments à préparer/éviter/surconsommer la semaine précédant l’événement.

Le lendemain, jeudi, dernière sortie vélo prévue, 1h30 tranquille, je pars à l’opposé du parcours vélo, pour découvrir un peu le long du fjord en direction du Hardangerbrua, le pont qui traverse le Fjord.


Sur le trajet aller, un bruit insistant se manifeste au niveau du pédalier, lors des deux dernières sorties cela avait été le cas sur le grand plateau, mais là c’est sur le petit. Petite parenthèse : en mai, après avoir retourné le problème dans tous les sens, en prévision du dénivelé à avaler, j’ai fait changer le groupe de mon vélo de triathlon, délaissant le 53-39 pour un plus raisonnable 52-36 (pour être complet : la cassette est une 28-11). Bref, je m’arrête au pont parce que je ne parviens pas à voir ce qui déclenche ce bruit. Je touche un peu le grand plateau, et là, je vois qu’il est descellé, seul le petit restant fixe. Le bruit vient des frottements aléatoires quand je pédale. La suite : montée d’adrénaline, « on se calme, on rentre à l’appart’ sur le petit plateau, et on voit si on peut resserrer tout ça ». Arrivé à l’appart’, vérification plus approfondie : il manque un des quatre boulons qui fixent le grand plateau au petit, et les trois autres sont presque complètement desserrés ! Ma moitié, un rien tétanisée par le stress en ces jours précédant ce qui sera un gros défi pour elle aussi (toute seule comme support), a sur ce coup le salutaire réflexe de me dire de ne pas bidouiller moi-même et d’aller voir le mécano d’Intersport, présent au village de la course, directement, car « plus ça va aller, plus il sera occupé ». Je me rends donc au « village-course », où Andreas (c’est le prénom du mécano) est déjà en effet fort occupé à réparer la batterie Di2 de John (BIB 232), mais je suis le suivant sur la liste. Il jette un coup d’œil aux plateaux, me rassure tout de suite en me disant qu’en resserrant et en faisant attention à chaque changement de plateau, cela devrait passer. Et juste avant de me laisser partir, petit bonus, il me dit : « attends, je vois que le boulon qui manque est celui situé sur la zone d’appui ; je vais déplacer celui qui est sur la zone de « point mort » pour le mettre là, il y aura encore moins de chance qu’un problème apparaisse ». Après m’être prosterné en sanglotant à ses pieds, je prends congé. Bon, en réalité, je le remercie juste chaleureusement, ce que je referai après la course : j’ai certes flippé à chaque changement de plateau pendant la course, mais au moins, sa réparation m’a permis d’atteindre T2 sans problème de pédalier…
En ce début de jeudi après-midi, la grisaille s’est installée, les nuages sont très bas et la pluie n’arrête pas de tomber. Un avant-goût de la course ? En tout cas, la pluie ne cessera pas avant la nuit. Il faut cependant bien tester la natation dans le fjord : vers 18h30, j’effectue donc 300m de natation près du débarcadère de l’hydravion. Mince, elle est plus froide que ce que je pensais, et en plus il y a des méduses… Finalement, je comprendrai pendant la course qu’il y a une partie plus froide (d’une longueur d’environ 500m) sur les 3,8km, et j’ai précisément effectué mon test à cet endroit-là (et nous sommes nombreux dans ce cas)…

Le lendemain matin, vendredi (veille de la course), test de 10 minutes avec le vélo pur s’assurer que la manip’ a bien fonctionné. L’occasion de faire quelques centaines de mètres en direction de la centrale électrique et de m’émerveiller encore devant le fjord…


La journée passe, je me mets avec ma femme devant la carte pour décider à quels endroits (repérés en venant) s’arrêter pour se ravitailler et changer de vêtements. A partir de ce moment-là, la pression sur les épaules de ma femme semble se faire plus légère. Peut-être est-ce simplement le fait qu’on commence à entrer dans le vif du sujet. Pratiquement parlant – ceci peut surtout être utile pour quelqu’un qui ne vient qu’avec une seule personne de support : nous avions imprimé tout le parcours vélo en très détaillé, avec des gros plans des zones de transition (ça faisait une vingtaine de pages A4 au total), et nous y avons marqué avec un crayon fluo les endroits de ravitaillement convenus, les ‘obligatoires’ et les complémentaires. Ma femme a ensuite copié et numéroté les arrêts obligatoires sur une seule feuille A4, avec indication approximative du kilométrage, et elle a collé cette feuille avec du scotch à côté du tableau de bord dans la voiture. Elle dit que ça l’a beaucoup aidée pendant la course même : elle pouvait pour ainsi dire voir le ‘plan’ de la course en un seul coup d’œil.

Je décide finalement de ne pas utiliser de cuissard de vélo mais un short de triathlon, pour ne pas trop perdre de temps aux transitions. Mais en cherchant dans mes affaires, impossible de mettre la main sur un tel short. Après avoir retourné mes sacs trois fois, je me résigne à aller acheter un short à la boutique Huub du village-course… Sur place, je n‘en vois qu’un, taille XXL, pas vraiment ce qu’il me faut, mais l’un des vendeurs m’en sort deux à la bonne taille d’un carton, et me dit que je peux les essayer dans les toilettes de l’hôtel. Il n’y a bien qu’en Norvège qu’un vendeur laisse partir un client potentiel avec deux shorts de 125 EUR chacun, en étant sûr que le type va revenir. C’est bien évidemment ce que je fais, l’un des deux shorts me convient. Je sais bien qu’on ne doit pas prendre le départ d’une course avec du matériel non testé, mais j’aurai au moins couru une demi-heure avec ce short avant de sauter du ferry : un petit tour sur les hauteurs d’Eidfjord, derrière l’église puis le long du fjord, le même jour en début de soirée, après le briefing obligatoire pour tous les athlètes et leurs supports.


Ce dernier, qui suit la distribution des balises GPS (une première cette année), est rondement mené, très complet, avec en prime une démonstration de danse folklorique locale qui soulève l’enthousiasme (à raison). A l’issue du briefing, plusieurs bénévoles répondent à d’éventuelles questions, en norvégien, anglais, français, allemand et même espagnol. Les bénévoles anglais et français étant assaillis, nous optons pour l’une des deux bénévoles germanophones, très au point sur tous les sujets malgré la précision de nos questions (elle connaissait même le PIB par habitant de l’Ouganda en 1984) ! Notons que cette séance de questions/réponses n’est pas du luxe pour certains compatriotes (NB : je suis français, même si j’étais inscrit sous mon autre nationalité, luxembourgeoise), qui, à en croire certains commentaires et essais de traduction simultanée entendus pendant le briefing, n’ont pas été très assidus en cours d’anglais au collège/lycée… Pour ceux qui lisent ces lignes et ont du mal avec la langue de Shakespeare (et de Jarvis Cocker), pas de panique, mais ma femme a quand même pu constater pendant la course que certains autres supports (français, mais pas seulement) n’avaient pas compris le SMS des organisateurs imposant le port de la veste fluo au-delà de Dyranut, jusqu’à Geilo (NB : SMS envoyé aux équipes de support pendant la natation). Quand on sait que l’on peut être pénalisé si l’on ne suit pas les instructions, ne pas bien comprendre les instructions en anglais peut coûter de précieuses minutes.


Après la petite sortie course à pied, il est temps pour moi de retourner au village-course. En effet, pendant le briefing, les tests de recherche médicale ont été mentionnés ; je sais que les scientifiques ont souvent du mal à trouver des cobayes, je souhaite donc m’inscrire aux deux programmes encore disponibles (sur trois) : sur le niveau d’Omega3, et sur la capacité pulmonaire. Finalement, comme certains concurrents qui s’étaient inscrits ne se sont pas présentés, je m’inscris aussi pour le 3e test, portant sur la température corporelle. Celui-ci nécessite d’avaler un émetteur (dans une sorte d’emballage plastique à l’apparence de gélule) juste avant de dormir. Il faut également porter un bracelet indiquant que l’on ne peut pas subir d’IRM. J’en termine avec ces inscriptions vers 20:00, il est temps de rentrer à l’appartement pour manger car nous avons prévu de nous coucher vers 21:30-22:00. En effet, le réveil est mis pour 2:00 du matin, car le parc fermé n’est accessible qu’entre 03:00 et 03:45 pour poser le vélo et les affaires qui vont avec, et nous devons tous être dans le ferry à 4:00 pétantes.

Finalement, nous serons dans notre lit vers 22:30. Je suis assez calme, j’ai l’impression que je vais arriver à m’endormir vite, mais quelques SMS d’encouragement venus du Grand-Duché (le dernier à 23:30) se chargent de retarder l’endormissement et de commencer à me faire un peu gamberger. Finalement, je dormirai probablement deux heures, mais j’ai lu pas mal de comptes-rendus des années précédentes qui parlaient de nuits encore plus courtes, voire même de pas de sommeil du tout, alors…

D’ailleurs, adrénaline oblige, quand le réveil sonne, nous ne sommes pas tellement dans le cirage.
Petit-dej’ avec confiture et tisane de la maison, pain local et cracottes de sarrasin (ne renions pas notre bretonitude), et il est temps d’aller poser le vélo à T1. En allant poser quelques affaires dans la voiture, ma femme entend un sonore « F*** » provenant de l’étage au-dessus. C’est là que dort Tu (BIB 101), un Californien très sympa participant pour la deuxième fois, avec lequel nous avons un peu discuté depuis le mercredi soir. Quelques minutes plus tard, on le croise avec sa femme sur la route de T1, il m’explique qu’il a déchiré sa combinaison en l’enfilant : il a effectivement un énorme trou le long de la hanche. Le Norseman est précisément la course où tu ne veux pas que cela t’arrive ; je n’ai pas revu Tu après la course, mais il a terminé, il a dû trouver une solution avec le duct tape qu’il tenait à la main en me montrant l’étendue des dégâts.

T1 est ouvert jusqu’à 3h45, nous faisons la file dans la nuit, les lumières des vélos clignotent, les bénévoles ne vérifient pas que les casques mais aussi les vestes fluo (il y a un recalé devant nous, heureusement, il a prévu une autre veste, « valable » celle-là ) et bien sûr les lumières en prévision de la course : elles doivent faire au minimum 100 lumen et rester allumées sur tout le parcours vélo. Devant nous, Harek (BIB 50) un habitué puisqu’il en est à sa 9e participation, nous dit « on a de la chance, il ne pleut pas ». (Petite parenthèse: après avoir lu ce compte-rendu sur la page facebook des athlètes, Bent, l'un des organisateurs, m'a signalé que le Harek en question, est... l'inventeur du Norseman. Ce qui explique le nombre de participations, et... le privilège du dossard 50 (il fêtait ses 50 ans en 2017).
Ceci dit, Harek est meilleur triathlète que météorologue: cinq minutes plus tard, il commence à pleuvoir, et cela ne cessera pas jusqu’à Dyranut, soit 3h30 plus tard… Si j’en crois certains comptes-rendus, certains triathlètes sortis plus tard de l’eau auront même eu de la pluie durant toute la partie vélo…
Petit bug dans le parc vélo, le concurrent BIB 182 s’est trompé de côté, la bénévole ne veut pas mettre son vélo à la bonne place mais me dit que je peux le faire moi-même, ce que je fais. Son vélo est à la bonne place, il a peut-être perdu 5 secondes en arrivant à T1 mais ce n’est pas ce qui fait la différence.
On positionne tout puis on se dirige vers le ferry en longeant le quai. Petit bisou, et c’est parti pour l’embarquement. On s’installe sur le pont à voitures, la plupart rentre à l’intérieur, au chaud. Après quelques minutes, le bateau quitte le quai et nous achemine à 200 mètres du départ. Bent nous arrose avec sa lance à incendie, petit passage aux toilettes, sans avoir dû faire trop la queue, Allan Hovda, vainqueur en 2014 et 2015, attend comme les autres, juste devant moi. Je ne fais pas la groupie « ton fils a le même prénom que moi » ou « Moi, je saurais reconnaître (mais pas suivre) Oscar Freire s’il partageait une sortie vélo avec moi », et j’enfile le haut de la combinaison, les chausssettes en néoprène, ma cagoule fine (Camaro titanium 1mm), le bonnet en néoprène et le bonnet Norseman par-dessus.

La natation (3,8km)

Les nuages sont bas et cachent les sommets entourant le fjord, c’est l’aube, il est temps de sauter dans l’eau. 200m à faire pour se rapprocher du bord du fjord, tout le monde essaie de se rapprocher des kayaks et de jouer un peu des coudes, l’atmosphère est calme…
Tôôôôôôtt ! La sirène du ferry retentit, et c’est parti. C’est loin d’être le pire mass-start que j‘aie vécu, quelques coups ici ou là, mais rien de bien méchant. Après maximum 500 mètres, je me cale derrière un nageur tout juste plus rapide que moi, et parviens à rester dans sa vague jusqu’au virage, là où brille un feu de joie allumé pour que l’on se répère : bref, j’aurai réussi à « drafter » sur environ 3 kilomètres de natation derrière Fernando (BIB229, j’ai levé la tête pour voir le numéro sur son bonnet), qui m’avouera plus tard avoir nagé plus vite parce qu’il sentait que quelqu’un était proche derrière. Après le virage, je le perds, mais il nous reste seulement 300 mètres à nager, tant mieux car l’eau est beaucoup plus froide ici qu’au départ (où l’on annonçait 14 degrés). On longe le quai où était amarré le ferry un peu plus d’une heure plus tôt, et juste après, on sort de l’eau par une petite plage nivelée par un tractopelle quelques jours plus tôt (c’est la première année qu’ils font ça, les années précédentes, c’était plutôt « galets et pierres glissantes »). A noter : pas de malheureuse rencontre avec les méduses aperçues un peu partout lors du test deux jours plus tôt. Les cnidaires ne seraient-elles pas matinales ?
Je sors de l’eau en 1h07 et passe devant la masse des supports officiels, tous en t-shirt blanc « support 2017 » ; ma femme ne m’attendait pas si tôt (moi non plus), elle court derrière moi et vient m’aider à me préparer pour le vélo. Pendant que je me change, un membre de l’équipe des tests médicaux se poste non loin de moi avec son capteur (sans jamais me gêner) et m’annonce que ma température corporelle est la même que sur le bateau 1h10 plus tôt : 37°2.

Chrono envisagé 1h30min (par crainte du froid et de la houle), chrono effectif 1h07min
Chrono envisagé pour T1 10min, chrono effectif 8min


Le vélo (180km)

Il pleut, je suis certes sorti 64e de l’eau mais comme d’habitude, j’ai traîné pendant la transition et certains concurrents me sont repassés devant. Il y a pas mal de trafic, les équipes de support commencent elles aussi l’ascension. Après quelques centaines de mètres, juste avant le premier tunnel, les athlètes sont orientés vers l’ancienne route, qui serpente le long du Eidfjordvatnet (« lac d’Eidfjord »), passant sous quelques arches creusées dans la roche. Il fait encore sombre et il faut rouler prudemment pour éviter les quelques nids de poule créés par l’usure de cette route qui n’est plus empruntée par le trafic routier. Nous retrouvons la route principale (jusqu'au 20e km, nous alternerons ancienne route et route actuelle) pour traverser Ovre Eidjord ; juste après, la route se cabre, c’est le vrai départ de l’ascension qui va nous amener 29km plus loin (et plus de 1000 m plus haut), à Dyranut. Je double plusieurs athlètes, et suis doublé par Florian (BIB 246), qui finira la course un peu moins de dix minutes devant moi. Dans les virages raides et serrés de l’ancienne route, j’entends un bruit qui m’inquiète un peu, toujours du côté du pédalier, ça crisse. Avec le recul, je me dis que c’était vraissemblablement de la terre au contact de la chaîne : il pleuvait pas mal pendant toute la montée, et certains endroits de la route étaient sales. En tout cas le bruit n’est plus réapparu sur les autres côtes.
Juste avant le parking de Voringfossen (km20, là où commence la zone où le support est autorisé), un autre bruit se fait entendre, cette fois, il ne vient pas de mon vélo, mais de celui d’une concurrente qui me double alors que j’ai bien l’impression qu’un patin de frein frottant sur sa roue arrière est la cause de ce bruit. Soit elle a dû réparer cela assez vite, soit c’est une femme bionique, parce que je verrai le soir même qu’il s’agit de Anne Nevin (BIB 68) qui va gagner l’épreuve féminine. Bon, elle a sûrement réparé son patin de frein, mais c’est en fait réellement une femme bionique : elle a battu le record du parcours alors qu’il s’agissait de son premier triathlon longue distance…
Je suis alors un peu inquiet, je me rends compte que je me suis trop couvert, il faisait 13° dans la vallée, et ça ne se rafroidit pas aussi vite que prévu. Je transpire à grosses gouttes, j’ai peur de la payer en arrivant sur le plateau, où il fait 7° ou 8° et où le vent est beaucoup plus présent.

J’effectue mon premier arrêt à l’endroit prévu, après Maurset, sous le barrage du Sysenvatnet. Une minute, juste le temps de prendre un bidon plein et d’en donner un vide à ma femme, et de convenir avec elle que je vais me couvrir davantage un peu avant Dyranut. Ce deuxième arrêt n’est que 8km après le premier, mais il a toute son importance, je pense qu’il a donné le ton du reste de ma course. Juste avant d’y arriver, je n’ai pas trop le moral, j’ai perdu quatre places (des athlètes que j’avais doublés quelques minutes auparavant) en ne m’arrêtant qu’une minute, ça grimpe bien, ce qui me convient, mais je n’arrive à rattraper que deux athlètes avant la pause « on sort la merino et la veste cycliste thermo ». Trois minutes pour se changer, mais là encore, avec le recul, on se rend compte d’une chose toute bête : les autres s’arrêtent aussi. De fait, je ne reverrai jamais les concurrents qui m’avaient redoublé à Maurset : ils se sont arrêtés plus longtemps à Dyranut. Le parking désolé de Dyranut est probablement le début d’un calvaire sans nom pour beaucoup depuis que le Norseman existe. Pour moi, ce sera l’inverse : vent arrière, on peut envoyer les watts sur le plateau, on se les gèle sévère, je ne sens plus mes pieds (ça m’arrive souvent sur le vélo en hiver) ni mes genoux (ça, ça ne m’arrive jamais), je ne recommencerai d’ailleurs à les sentir que vers le 120e km. Je ne double pas grand monde, mais j’ai l’impression que je gagne du temps sur ceux qui me suivaient. Seul Morten (BIB 100) me double dans un faux-plat descendant, comme une balle, j’en ai encore une otite. Je le reverrai plus tard, le doublant au 10ekm du marathon. Ma femme s’arrête régulièrement, mais je lui fais tout le temps signe que tout est OK. J’ai de toute façon toute la nourriture sur moi pour ne pas trop la solliciter, seuls les bidons et éventuellement les vêtements sont à changer.
L’arrêt suivant est donc à la sortie d’Ustaoset ; je m’arrête pour enlever ma veste fluo, mais ma femme me rappelle que je dois la garder jusqu’à Geilo, conformément au SMS envoyé par l’organisation quand nous étions dans l’eau. Bref, un arrêt pour rien, mais seulement une minute de perdue. J’effectue l’arrêt suivant au début de la montée qui commence après Geilo : exit la veste fluo et la thermo, retour de la veste plus légère, que je garderai jusqu’à T2.

A partir de Geilo, il reste encore 4 côtes, et là, c’est la razzia : je suis 61e àGeilo, j’arrive à Immingfjell, sommet du dernier col, sans avoir effectué de pause, en 42e position. J’ignore quel est mon classement complètement à ce moment là : ma femme n’a pas de smartphone et ne peut donc pas vérifier mon classement temporaire sur le site du Norseman. Je m’arrête une dernière fois Immingfjell pour un échange de bidons.


Plus que quelques kilomètres de faux plat montant, puis ce sont les 30 derniers km vers T2, très roulants, cela débute par une descente (attention aux nids de poule dans les deux premiers km, on nous a prévenus au briefing, et je les avais notés sur la carte lors du voyage aller, mais un incident est vite arrivé à de telles allures), puis faux plat descendant jusqu’à T2. Très peu de voitures dans la descente, un seul athlète, Solve Magnus (BIB239) me double au tout début ; de mon côté je ne rattrape personne, un besoin pressant faisant baisser ma moyenne. Deux épisodes de pluie battante sur les derniers km, mais ce n’est pas trop désagréable car la température redevient clémente à mesure que l’on redescend.
Heureusement que j’ai perdu un peu de temps dans la descente, car quand j’arrive à T2, ma femme n’y est que depuis cinq minutes et ne m’attendait pas si tôt. En regardant la vidéo de la course, on s’aperçoit qu’elle hésite sur l’endroit à choisir (il y a une vingtaine d’emplacements disponibles, vu qu’il n’y a aucune chance que tout le monde arrive en même temps…), et prend son temps… Cela nous a bien fait rire en le regardant, mais nous aurions peut-être été moins détendus si elle n’avait pas eu le temps de préparer les affaires de course à pied.

Chrono envisagé 7h, chrono effectif 6h30min
Chrono envisagé pour T2 10min (je préfère prévoir –très- large pour les transitions), chrono effectif 4min
Chrono envisagé en sortie de T2 : 8h50 min, chrono effectif : 7h45min


La course à pied (42km)

J’avais envisagé de faire toute la course à pied avec un camelback, mais comme mon support (et chère et tendre) s’en est très bien sorti pendant la partie vélo et semble avoir laissé le stress des derniers jours derrière elle, je ne prends que quelques gels, je change de vêtements (le haut), j’enfile mes chaussures, et c’est parti. A la sortie de la zone de transition, une dame tient un classeur en l’air, elle tourne la page quand j’arrive, et je vois « 43 ». N’n croyant pas mes yeux, je lui demande s’il s’agit vraiment de mon classement actuel, elle acquiesce dans un grand sourire. Je lui réponds alors « Beaucoup mieux qu’attendu ! ». En effet, suite aux calculs d’apothicaire effectués les mois précédents pour essayer d’estimer les temps de passage nécessaires à l’obtention du t-shirt noir, même dans mes rêves les plus fous, je ne me voyais pas faire mieux que 90e…
Je me rends compte que je n’ai plus trop de sensibilité dans le pied gauche, ça m’inquiète un peu dans l’optique du reste de la course, mais bon, premièrement, je viens d’apprendre qu’il faudrait que 120 personnes me dépassent d’ici l’arrivée pour que je n’aie pas le droit de monter au Gaustatoppen, deuxièmement, je ne vois personne derrière moi même en me retournant au bout de lignes droites, et troisièmement, je gagne du terrain sur le coureur qui me précède. Finalement, mes pieds se réchauffent (je pense que c’était le principal problème), et je garde mon allure de +/- 4min50/km. Là encore, je ne pensais pas pouvoir tenir une telle allure, surtout que ces premiers 25km ne sont pas si plats que ça, comme je l’avais constaté lors du voyage aller. Mais bon, je décide de ne pas me mettre en danger, je tourne à la même allure avec ma moyenne d’un peu plus de 133 bpm, ce qui est plutôt bas pour de la course à pied pour moi. Je grapille quelques places et ne suis doublé que par Andreas (BIB 211), qui fera le 8e temps de course à pied et finira 17e de la course.
Au 20e km, après Miland, on découvre l’ampleur de ce qu’il reste à accomplir : le Gaustatoppen se dresse devant nous.

Encore quelques kilomètres, dont une petite côte tranquille en amuse-bouche avant d’arriver à Rjukan. Je double Kjell Magnus (BIB 6), le 5e de l’édition 2016 du Norseman (6e en 2015). Visiblement, il a eu un souci sur la course à pied (il était 4e en quittant T2) , mais il arrivera quand même là-haut 49e et avec la banane, ce qui fait plaisir à voir.
Juste avant Rjukan, au 25e km, on tourne à droite, on passe le pont et là, la pente s’élève violemment, c’est le pied de la si redoutée Zombie Hill : 7,2km de montée à 9,3% de pourcentage moyen.
Je suis alors 36e, je me sens toujours bien, je cours toujours mais évidemment à une allure beaucoup plus lente (je suis désormais un peu en dessous des 7min/km). Je fais trois km comme ça, je double quelques concurrents qui marchent, mais peu après le 3e lacet, je sens que j’ai un peu de mal à respirer. Je fais encore quelques centaines de mètres, mais ça ne veut pas s’en aller. Je suis alors 32e, mais qui se souviendra dans 3 mois que j’ai fini 20e ou 50e ? Je décide donc de me mettre à marcher, la moyenne passe certes à plus de 10min/km, mais je me sens plus à l’aise avec ma respiration.

Rune (BIB 88), qui court avec sa sœur (on a le droit d’être accompagné à partir du pied de la montagne), que j’avais dépassé, me rattrape, j’essaie de rester avec eux et de discuter, je fais ça environ dix minutes, mais ils vont quand même un peu plus vite que moi, je ralentis donc un peu.
J’arrive enfin au point de contrôle du km 32,5, la commissaire de course me félicite et me dit que je peux prendre à manger et à boire. Je prends un gobelet de chips et j’attends un peu, on avait parlé d’un contrôle médical pour voir si les concurrents peuvent continuer… Mais en fait, il n’ya rien, ou alors j’ai l’air suffisamment bien pour qu’on ne me contrôle pas… Au bout d’une minute ou deux, je demande si je peux y aller, les filles me disent « Oui, bien sûr ! » C’est une différence culturelle que l’on avait déjà constatée en Suède et lors de notre premier voyage en Norvège : les locaux te laissent te tromper plutôt que te dire, par exemple « C’est un cul-de sac au bout de ce couloir » quand ils voient deux touristes hésitants s’aventurer dans la mauvaise direction, ou « Qu’est-ce que tu attends, tu peux monter au Gaustatoppen… » quand ils voient un triathlète qui les regarde avec insistance pour savoir quand on va l’autoriser à monter… C’est peut-être moi, mais je me poserais des questions si je voyais un type qui s’est levé à 2h du mat’ pour nager 3,8km, rouler 180km, et qui après 32km de course à pied, occupe la 36e place sur 245 et reste planté là à grignoter des chips.

Cette petite pause n’a de toute façon pas de conséquence sur la suite ; à partir de ce point, ma femme gare la voiture et m’accompagne à pied (et un peu en courant sur le replat du 35-36e km). Nous portons tous deux le sac à dos avec tout le matériel énuméré dans le règlement (vêtements chauds – mais on en porte une partie sur nous-, coupe-vent, lampe de poche ou frontale, téléphone, cash, bonnet, gants, eau et nourriture). Jusqu’au 37,5e km, départ de la partie trail (là où les sacs à dos sont contrôlés), ma femme porte un peu plus d’affaires que moi, on transvase juste avant le contrôle.

Ma pause au 32,5km a permis à Magnus (BIB 277), tout jeune Norvégien, de revenir à notre hauteur avec le copain qui l’accompagne, on discute un peu sur quelques centaines de mètres, il nous distancera nettement sur la partie trail.
Sur cette partie, on ne fait plus que marcher. On la débute en 33e position, mais ma femme est moins à l’aise sur ce type de parcours très rocailleux qu’en course à pied, alors on perd quelques places dans la montée finale, qui nous prendra un peu moins d’1h20. En route, nous aurons quand même doublé Marcus (BIB 11), vainqueur de l’Ironman de Kalmar en 2016. Finalement, c’est sur les derniers 500 mètres, plus raides, que l’on perd trois places.

A 10 mètres de l’arrivée, il ne reste que quelques marches mais je laisse passer Trude (BIB 32), 5e femme, pour pouvoir arriver ensemble avec ma femme, qui a une grande part dans ce résultat, et sur qui j’ai pris un peu trop d’avance dans l’enthousiasme des dernières longueurs. Nous passons la ligne en 12h53min, accueillis chaleureusement par des bénévoles, l’un me donne tout de suite un plaid, une autre me tend le fameux bol de soupe…


Après avoir savouré l’instant une dizaine de minutes, on rentre dans la « hytta », pour que je passe les tests médicaux finaux. Ce sont les mêmes que la veille, sauf pour le test de la température, pour lequel je dois tenir le moniteur pendant une quinzaine de minutes devant mon ventre pour qu’il charge toutes les données de la course, transmises par l’émetteur que j’ai avalé avant de me coucher. Le test de capacité pulmonaire révèle une détérioration depuis la veille ; pas surprenant vu les soucis rencontrés dans Zombie Hill. L’une des concurrentes fait un malaise, victime de soucis digestifs, elle sera évacuée quelques minutes plus tard. Le lendemain à Gaustablikk, elle semble en pleine forme, plus de peur que de mal.
Après en avoir terminé avec les tests, j’essaie à peu près tout ce qu’ils ont sur le menu, une soupe de plus (la même) deux hot-dogs et une gauffre à la confiture. Ca creuse le Norseman, heureusement que j’avais lu quelques compte-rendus évoquant les délices de la hytta. Détail à noter : les organisateurs demandent à ce que l’ont ait du cash dans le sac pour monter, mais les personnes qui gèrent la cabane préfèrent que l’on paie… par carte (même s’ils acceptent l’argent liquide).
Descente dans la vallée, nous logeons au même endroit que 5 jours plus tôt lors du voyage aller. Je commence un peu à piquer du nez, on décide de zapper le banquet au Gaustablikk et de commander une pizza. Nos voisins sont aussi un « binôme Norsemanien », Robert (BIB 180), qui « arrête le triathlon » et un ami à lui. Ils font exactement la même chose que nous (pizza+dodo ), et l’ami de Robert nous fait bien rire en ouvrant le coffre de la voiture pour constater l’étendue du désastre (oui, accompagner un triathlète sur une telle distance quand on est tout seul, ça laisse peu de temps pour ranger soigneusement les bidons vides, les vêtements sales et mouillés, les emballages de gel…) ; il marque un temps d’arrêt en voyant tout ça et lâche d’une voix monocorde : « Et maintenant on est coincés avec toute cette merde… ».

Le lendemain, remise des t-shirts à l’hôtel Gaustablikk, quelques larmes pour ma femme quand je récupère mon t-shirt noir… C’est aussi le sien, après tous les efforts qu’elle a fournis ces derniers mois, et encore plus ces derniers jours. Pas sûr qu’il y ait beaucoup d’athlètes à « support unique » devant nous, d’ailleurs. Même s’il n’y a qu’un seul support « officiel » (celui qui parcourt les 10 derniers km avec l’athlète), il n’est pas interdit d’avoir plusieurs personnes qui suivent un athlète. Beaucoup de Norvégiens viennent ainsi avec leur famille et/ou des amis. Une personne conduit la voiture, une deuxième tend les bidons, la troisième prend des photos… Quand le support est seul, il est au four et au moulin, il s’est aussi levé à 2h du matin, a dû se concentrer sur la route ET le ravitaillement de son athlète, puis courir la fin du marathon… Et en plus il a dû redescendre de la montagne à pied, seuls les athlètes descendant par le funiculaire sous-terrain. Encore que… Si le funiculaire n’est pas plein, les supports peuvent payer leur place (250 NOK tout de même, soit 26 EUR au cours actuel ; c’est la Norvège, tout est cher même quand on est habitué aux prix du Grand Duché) et faire la queue (qui n’était pas trop longue quand je suis redescendu) pour emprunter le funiculaire aussi. Malheureusement, quand je me suis rendu compte de cette possibilité, ma femme avait commencé à descendre depuis 10 minutes.
Bref, elle a bien le droit de verser une petite larme quand j’enfile le t-shirt ! On effectue ensuite la traditionnelle photo de groupe...
Puis on se disperse, quand quelqu’un hèle : « Les français ! La photo !». Bon j’étais inscrit comme Luxembourgeois, mais je n’ai pas renoncé à ma première nationalité pour autant, alors je pose avec les autres (NB: presque seulement des t-shirts noirs chez les Français cette année). Opportunisme national : je suis le premier luxembourgeois à terminer le Norseman, mais je n’aurais même pas été sur le podium des Français si je m’étais inscrit en tant que tel (4e, médaille en chocolat). Je ne gagne même pas le classement des Bretons, Vincent (BIB 90) a terminé un petit ¼ d’h devant moi.

Message de remerciements adressé au staff sur le groupe facebook des athlètes du Norseman 2017 :

A big THANK YOU to:
- The crazy guys who invented Norseman Extreme Triathlon.
- The volunteers, helping, smiling, and often cheering, who make this triathlon what it is.
- The Norwegians, for their enthusiast "Heja, heja!" in all the climbs (there are a few).
- The competitors: maybe it's the awareness to be part of 250 "happy few" that makes the people much friendlier than on other long-distance triathlons, but still: it is sport as I like it.
- Bent Olav Olsen, it was a pleasure to see that you enjoyed these couple of days as much as we did (constant smile on the ferry...)
- The fjord, for not being too cold this year.
- The wind for blowing eastwards. Just the direction we were heading to on the plateau. I don't want to imagine having to ride against it there.



- Andreas, the mechanics from Intersport, who saved my race... It assume I wouldn't have been the 41st on the bike ride with only the small chainring (36) for 180km.
- The live broadcast and athlete tracking: I thought my friends would just check the result on Saturday evening, like for any other race, but there were quite a few people that literally sticked to their screens.
- The medical researchers (Body temperature, Breath capacity, Omega3). I'm curious to see the results...
- The cook who made the soup.

I'm probably forgetting many people (NB: Family and friends got direct messages...), but there will be a race report (I'll try French + English, because race reports helped me a lot to prepare the race) in a month or two. Did I say a couple of weeks?




PS: Zombie hill is not a hill. It's a mountain.


Le profil du parcours vélo:

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Le profil du marathon:
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warp1977
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

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Bravo et merci pour ce magnifique compte rendu :D
cartman
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

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très beau compte rendu !!!

felicitation pour ton résultat
yoann-51
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par yoann-51 »

Impressionnant !!!!! Le type raconte une aventure de fou avec une humilité désarmante, et la complicité avec ta femme est touchante 😘
Bravo en tout cas 💪
Le sport va chercher
la peur pour la dominer,
la fatigue pour en triompher,
la difficulté pour la vaincre. P de Coubertin
Seb64
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par Seb64 »

Félicitations pour ta course et merci pour ton comte rendu, ca fait plaisir de le lire et peut aider d'autres futurs participants!
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phil76400
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par phil76400 »

la course d'une vie !
Congratulations pour la course et pour la prose

Comme j'aime dire ce qui est devenu ma maxime : "vivement que ça s’arrête jamais !"
claude
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par claude »

Bravo pour ton parcours et pour ton récit !

Ca montre bien que c'est une catégorie au dessus d'un l'IronMan "normal"... et même au dessus d'Embrun qui n'est déjà pas un cadeau...

Apparemment c'est très souvent qu'en plus, il y fait un temps de cochon ?
Claude
Jonasko
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par Jonasko »

claude a écrit : 19 mars 2018 18:57 Bravo pour ton parcours et pour ton récit !

Ca montre bien que c'est une catégorie au dessus d'un l'IronMan "normal"... et même au dessus d'Embrun qui n'est déjà pas un cadeau...

Apparemment c'est très souvent qu'en plus, il y fait un temps de cochon ?
Merci!
Je n'ai pas entendu parler d'édition sans pluie en discutant avec quelques "anciens" :D . Et comme la température maximale dont on peut rêver sur le plateau est de 10°, ça peut rendre le parcours vélo bien piquant. Mais comme indiqué dans le résumé, j'ai eu beaucoup de chance: temps sec et vent dans le dos sur le plateau. Il faisait juste beaucoup trop froid pour ce que j'avais mis sur mes jambes: rien :mrgreen: Et des couvre-chaussures n'auraient pas été du luxe...
Alex57000
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par Alex57000 »

Super compte-rendu :o
On a pas envie d'arriver à la fin...

J'aime beaucoup la façon dont tu racontes l'organisation d'une telle épreuve et surtout le soutient de tes proches!

Bravo pour ta course :sm2:
Jerome.A
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par Jerome.A »

Super! Felicitations a vous2! La famille est necessaire pour faire un IM mais la ont est dans une autre categorie.
By failing to prepare you are preparing to fail
bokeh
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par bokeh »

Superbe CR. :)
Bel exploit ! Beau moment d'émotion que tu nous partages. :wink:
JeanMoulu
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Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par JeanMoulu »

Superbe compte rendu.
Félicitations.
Bravo à toi et bravo a ta femme.
SESSIONNER
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Localisation : Toulouse

Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par SESSIONNER »

Je suis très impressionné par ta performance, que tu as amplement mérité à la vue du contenu de ta prépa ! Bravo à toi mais aussi bravo à ta femme qui a fait preuve d’un dévouement sans faille ! C’est très beau.
Ton compte rendu est également très plaisant à lire et pourra inspirer bien des sportifs, moi le premier.
Merci 😊
Sportivement
Romain
Boudu cong!
ELTITO
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Inscription : 25 juin 2006 08:04

Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par ELTITO »

J'étais fatigué, résultat: 40' pour le lire, mais quel plaisir. Bravo à toi
Marathonien en 2h50, le vrai départ de ma vie sportive c’est 2019 avec IM Copenhague (9:50) et Kona (10h44). Une 1ère année de rêve.
2021: IM Barcelone
2022: IM Nice / IM Kona
2023: IM Thoune et IM Cervia
2024: IM Kona
Matt48
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Inscription : 22 nov. 2013 11:43

Re: Compte-rendu Norseman 2017

Message non lu par Matt48 »

Super CR, merci pour le partage et bravo pour la perf dans un environnement rugueux !!

Je l'ai fait en 2014 (tee-shirt blanc) et y retourne cette année en espérant pouvoir monter tout la haut. Après cela, retraite sportive ! (enfin façon de parler).

Edit : tu as parfaitement raison sur le fait que le nombre de supports est important. En 2014, j'en avais un seul et ce fut un peu le bordel car il devait effectivement tout gérer. Cette année, j'en aurai 2, ça sera j'espère plus fluide.

Bien sur, lorsque l'on vient de loin, ça complique la donne.
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